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Full text of "Les pêcheries du Canada [microforme]"

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Photographie 

Sciences 
Corporation 


23  WEST  MAIN  STREET 

WEBSTER,  N. Y.  14580 

(716)  872-4503 


CIHM/ICMH 

Microfiche 

Séries. 


CIHM/ICMH 
Collection  de 
microfiches. 


Canadian  Instituts  for  Historical  Microreproductions  /  Institut  canadien  de  microreproductions  historiques 


Technical  and  Bibliographie  Notes/Notes  techniques  et  bibliographiques 


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s/ 


Pages  damaged/ 
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D 


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Le 


titre  de  couverture  manque 


D 
0 


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Pages  restaurées  et/ou  pelliculées 

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D 
D 


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Cartes  géographiques  en  couleur 

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Planches  et/ou  illustrations  en  couleur 


\/ 


□ 
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Pages  détachées 

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Qualité  inégale  de  l'impression 


D 


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Relié  avec  d'autres  documents 


□    Includes  supplementary  matériel/ 
Comprend  du  matériel  supplémentaire 


D 


D 


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D 


Seule  édition  disponible 

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slips,  tissues,  etc.,  hâve  been  refilmed  to 
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Les  pages  totalement  ou  partiellement 
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et  de  haut  en  bas,  en  prenant  le  nombre 
d'images  nécessaire.  Les  diagrammes  suivants 
illustrent  la  méthode. 


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PUISSANCE    DU     CANADA. 


Les  Pêcheries  du  Canada 


PAR 


L.    Z.    ION  CAS 


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PUBLIÉ  PAR  LE  DÉPARTEMENT  DE  L'AGRICULTURE. 


OTTAWA. 
1886. 


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ETENDUE  DES  PECHERIES  CANADIENNES. 


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Je  110  crains  pas  que  Ton  mo  taxe  d'exagération,  si  je  dis  quo  la  ConfédératioiB 
Canadienne  possède  les  pêcheries  les  plus  étendues  et  les  plus  riches  du  monde  entier» 

"  Comme  domaine  national,"  nous  dit  l'Honorablo  Peter  Mitchell,  qui  était  Ministre 
delà  Marine  et  des  Pêcheries  en  1870,  "elles  sont  inostiniaV)les,  et  comme  champ 
ouvert  à  l'esprit  d'entreprise  et  d'industrie,  elles  sont  inépuisables.  (  )utre  leur  impor- 
tance au  point  de  vue  du  commerce  et  de  la  richesse  maritimes,  elles  ont  aussi  une 
valeur  particulière  i)Our  les  habitants.  La  grande  variété  et  la  qualité  supérieure  des 
produits  de  mer  et  de  rivières  de  cette  colonie,  offrent  une  nourriture  copieuse  et  écono- 
mique, admirablement  propre  aux  besoins  domestique  d'une  population  mixte  et  labo- 
rieuse- Elles  ont  encore,  sous  d'autres  rapports,  une  valeur  spéciale  pour  ceux  qui 
suivent  la  carrière  maritime,  comme  industrie  distincte  ou  jointe  à  l'agriculture.  Le» 
principales  localités  où  l'on  se  livre  à  la  pêche,  ne  sont  pas  généralement  favorables  â 
l'agriculture  ;  elles  sont  jieu  fertiles,  ont  i)eu  d'étendue  et  sont  soumises  à  certain» 
désavantages  de  (ilimat.  La  fécondité  des  eaux  avoisinantes,  dont  la  population  pro- 
fite sans  empêchenients,  est  une  compensation  pour  les  défauts  du  sol  et  du  climat. 
Pour  cette  seule  raison,  les  pêcheries  cotières  et  intérieures  sur  lesquelles  les  sujet» 
Britanniques  ont  des  droits,  ont  une  valeur  hors  ligne." 

A  ces  affirmations  d'un  de  nos  hommes  publics  les  plus  marquants,  j'ajouterai 
quelques  chifires,  (jui  feront  mieux  comprendre  encore  (piel  champ  immense  d'exploi- 
tation noj  pêcheries  offrent  à  l'esprit  d'initiative  et  d'industrie  de  nos  habitants,  aux 
capitahstes  canadiens  et  étrangers  et  à  une  émigration  triple  et  quadruple  de  notre 
population  actuelle. 

Le  Canada  égale  en  étendue  la  république  des  Etats-I^nis,  il  est  à  peu  de  milles 
près,  aussi  grand  (lue  l'Euro^ie  toute  entière:  soit  environ  la  (quatorzième  partie  de 
toutes  les  terres  du  globe. 

Borné  au  Nord  par  l'Océan  Arctique,  à  l'Est  i)ar  l'Atlantique  et  à  l'Ouest  par  le 
Pacifique,  il  possède  au  delà  de  5,500  milles  de  côtes  maritimes  bordées  par  des  eaux 
riches  en  poissons  commerciaux  de  toutes  sortes.  Au  nombre  de  ses  mers  intérieures, 
il  compte  la  Baie  d'Hudson,  le  Détroit,  ou  plutôt  la  mer  de  Davis,  le  Golfe  St-Laurent, 
tributaires  do  l'Atlantique,  la  mer  Polaire,  la  mer  de  Baffin  nur  l'Océan  Arctique. 
Signalons  encore,  il  propos  de  mers  :  le  Détroit  de  Belle-Isle  au  Nord  du  Golfe  St-Lau- 
rent,  les  Détroits  de  Canso  et  do  Northumberlandi  au  Sud  du  même  (iolfe,  la  Baie  do 
Fundy  entre  la  Nouvelle-Ecosse  et  le  Nouveau-Brunswick  et  la  Baie  des  Chaleurs 
entre  cette  dernière  Province  et  la  Province  de  Québec. 

N'oublions  pas  do  mentionner  aussi  les  lacs  Supérieur,  Erié,  Huron  et  Ontario  qui 
sont  autant  de  mers  intérieures  et  dont  la  superficie  égale  27,000  milles  carrés. 

Laissant  de  côté,  pour  un  instant,  les  3,000  milles  de  côtes  maritimes  quo  possède 
la  Colombie  Anglaise,  et  les  immenses  mers  intérieures  du  Nord-Ouest,  dont  les 
richesses,  n'ayant  pas  encore  été  exploitées,  nous  sont  en  conséquence  pou  connui^s;  il 
nous  reste,  dans  les  vieilles  provinces  de  la  Confédération,  c'est-à-dire,  dans  la  Nou- 
velle-Ecosse, Québec,  le  Nouveau-Brunswick,  l'Ile  du  Prince  Edouard  et  Ontario,  2,500 
milles  de  côtes  maritimes,  une  nappe  d'eau  intérieure  dont  la  superiicie  égale  122,000 
milles  carrés  et  un  nombre  considérable  de  rivières  importantes  où  abondent  une 
variété  de  ijoissons  d'une  grande  valeur  commerciale. 


Ainsi,  soit  que  nous  les  considérions  au  point  de  vue  de  l'étandue,  de  l'importance, 
de  l'abondance  de  l'aliment  qu'elles  fournissent,  ou  de  leur  valeur  plus  firande  encore 
comme  ressource  susceptible  d'un  développement  toujours  croissant  et  d'une  reproduc- 
tion illimitée,  les  ricbes  pêcheries  qui  bordent  les  côtes  du  Canada  et  celles  que 
renferment  ses  grands  lacs  et  ses  belles  rivières,  sont  une  propriété  nationale  précieuse 
et  durable.  Employant  auntiellement  un  capital  de  plusieurs  millions  de  piastres, 
donnant  de  l'occupation  et  des  moyens  do  subsistance  à  des  centaines  de  mille  de 
personnes,  encourageant  la  carrière  maritime,  favorisant  le  développement  de  la 
marine  commerciale  et  notre  commerce  avec  l'étranger,  tenant  constamment  eu 
activité  et  en  disponibilité  une  classe  indépendante  et  énergique  de  marins,  elles 
méritent  notre  sérieuse  attention,  une  appréciation  éclairée  et  un  encouragement  en 
rapport  avec  leur  valeur  et  leur  importance. 

Aussi,  constate  encore  l'Honorable  Peter  Mitchell,  "  les  Canadiens  comprennent 
davantage  cbacjue  année,  la  vaste  importance  do  leurs  i)écberies,  et  sont  plus  que 
jamais  disposés  à  les  conserver  comme  la  ]>lu6  belle  fortune  matérielle  de  notre  héri- 
tage colonial." 

"  Le  fait  que  les  nations  étrangères  ont  toujours  tenu  avec  tant  de  ténacité  aux 
droits  et  à  la  liberté  comnume  qu'elles  ont  pu  s'assurer  dans  ces  pêcheries,  et  l'empresse- 
ment que  manifestent  les  étrangers  à  obtenir  la  jouissance  de  <'es  privilèges  lucratifs 
et  étendus,  constituent  la  plus  forte  preuve  de  l'importance  grandissante  de  leur  pos- 
session ainsi  que  de  leur  valeur  commerciale  et  industrielle. 


II 


VALEUR  DES  PECHERIES  CANADIENNES. 

L'on  me  demandera  peut-être  si  la  richesse  et  la  valeur  des  pêcheries  canadiennes 
sont  égales  à  leur  étendue  ? 

Quoique,  vu  l'insuffisance  de  notre  population,  nos  ix'cheries  soient  encore  loin 
d'avoir  acquis  tout  le  développement  dont  elles  sont  susceptibles,  leur  produit  annuel, 
cependant,  comparé  avec  le  nombre  d'hommes  qui  y  sont  activement  et  régulièrement 
employés,  comparé  aussi  au  produit  des  pêcheries  de  même  nature  dans  les  autres 
parties  du  globe,  prouve  évidemment  qu'elles  sont  des  plus  riches  et  des  plus  pro- 
ductives. 

A  mesure  que  notre  population  augmente  et  que  nous  poiivons  consacrer  plus  do 
bras  à  cette  industrie,  sa  valeur  croît  dans  une  proportion  considérable. 

Le  Professeur  Brown  Goode, — commissaire  représentant  les  Etats-Unis  à  l'exposi- 
tion internationale  des  pêclieries  de  Londres,  en  1883 — dans  un  discours  qu'il  prononça 
au  Con  grès  des  pêcheries  en  rapport  avec  cotte  exposition,  fit  mention  de  Vimmensc 
accroisscmevt  des  pêcheries  canadiennes  pendant  la  dernière  décade.  Il  déclara 
qu'après  ime  étude  approfondie  et  attentive  de  ce  sujet,  il  était  tout  à  fait  étonné — 
perfectlij  omazcd — du  développement  rapide  de  cette  industrie  au  Canada. 

Eu  effet,  si  nous  consultons  les  chiflres  soigneusement  compilés  tous  le6  ans  par 
nos  officiers  des  i)êcheries,  ces  statistiques  officîielles  nous  montrent  que  la  valeur  des 
pêcheries  canadiennes,  qui  en  1870  n'était  que  de  sept  millions  cinq  cent  soixante  et 
treize  mille  piastres,  avait,  en  1880,  atteint  le  chiffre  de  quatorze  millions  et  demi, 
conséquemmont  avait  doublé  pendant  dix  ans. 

Et  si  nous  étudions  les  derniers  ra])port8  officiels  publiés  par  le  Ministre  de  la 
Marine  el  des  Pêcheries,  nous  y  verrons  ijue  ces  mêmes  pêcheries  dont  la  valeur  totale, 
en  1880,  était  «le  quatorze  millions  et  demi,  ont  i)roduit  dix-sept  millions  et  demi  en  1883. 
Augmentation  :  trois  millions  en  trois  ans. 

Quoiqu'il  semble  admis  que  notre  système  d'inspection  soit  efficace;  quoique 
l'organisation  du  service  extérieur  de  notre  ministère  de  la  Marine  et  des  Pêcheries, 
et  nos  moyens  de  recueillir  les  statistiques  des  pêches  soient  donnés  comme  modèles, 
cette  organisation,  cependant,  laisse  encore  à  désirer.    L'on  comprend  facilement  que 


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<\ans  un  pays  aussi  vaste  et  aussi  étendu  que  le  Canada,  où  chacjue  colon  a  toutes  les 
facilités  possibles  pour  pêcher,  où  à  quelques  pas  de  sa  demeure,  tout  habitant  peut, 
chaque  jour,  aller  chercher  le  poisson  nécessaire  à  la  nourriture  de  sa  famille,  il  est 
impossible  peur  nos  statisticiens  d'arriver,  dans  leurs  rapports,  à  une  précision 
mathémati(]ue  ;  et  ces  rapports  n'ont  aucune  prétention  à  l'exactitude  au  sujet  de  la 
consommation  locale  et  journalière. 

Le  rédacteur  de  l'un  des  principaux  journaux  de  la  Nouvelle-Ecosse,  la  plus  impor- 
tante de  nos  provinces  maritimes,  disait  le  25  de  juin  1884  :  "  C'est  un  fait  bien  connu 
que  les  rapports  actuels  de  la  quantité  et  de  la  valeur  du  poisson  capturé  dans  les  eaux 
canadiennes,  sont  bien  au-dessous  de  la  prise  et  de  la  valeur  réelles,  et  la  publication 
<le  ces  chiffres  comme  statistiques  officielles  est  de  nature  il  induire  en  erreur." 

"  Nous  croyons  (jue  les  officiers  de  la  division  des  ]>êcheries  font  tout  on  leur  pou- 
voir pour  transmettre  au  ministère  des  chiffres  aussi  exacts  que  possible,- mais  i^ 
serait  absurde  do  penser  que  les  statistiques  des  pèches  que  l'on  nous  fournit  actuelle- 
ment, donnent  une  juste  idée  de  la  quantité  du  poisson  pris  dans  nos  eaux." 

"  Considérant  notre  position  actuelle  et  les  propositions  qui  nous  seront  vrai- 
semblablement faites  par  nos  amis  de  Washington  après  l'abrogation  du  traité  de 
Halifax,  il  est  très  important  que  nous  puissions  avoir,  sur  le  rendement  de  nos  pêches, 
leur  étendue  et  leur  valeur,  les  données  les  plus  exactes  et  les  plus  complètes  possibles. 
Quoique  nos  inspecteurs  fassent  bien  leur  devoir,  à  ce  sujet,  ils  ne  peuvent  eux-mêmes, 
croyons-nous,  s'empêcher  d'admettre  que  leurs  rapports  ne  contieiment  qu'un  estimé 
-approximatif  de  la  quantité  et  de  la  valeur  du  poisson  pris  dans  les  différentes  Pro- 
vinces de  la  Confédération." 

"  Les  statistiques  officielles  de  la  Province  d'Ontario  pour  188o,'évaluent  la  quan- 
tité totale  de  poisson  capturé  à  un  million  de  piastres,  et  des  personnes  bien  renseignées 
■de  cette  Province,  nous  disent  que  ce  chiffre  ne  représente  pas  plus  «pie  la  moitié  de 
la  valeur  réelle  ;  donnant  comme  exemple,  les  opérations  d'une  maison  engagée  dans 
îe  commerce  du  poisson,  qui,  à  elle  seule,  a  fait  des  affaires  en  cette  branche  pour  au 
<lelà  d'un  quart  de  million  de  piastres." 

"  Nous  tenons  de  bonne  source,  que  les  statistiques  pour  le  Cap  Breton  sont  bien 
au-dessous  de  la  quantité  réelle  de  poisson  pris  par  les  pêcheries  de  cet  endroit." 

Les  remarques  qui  précèdent  peuvent  s'appliquer,  avec  plus  de  force  encore,  à  la 
Nouvelle-Ecosse,  au  Nouveau-Brunswick  et  à  Québec,  où  les  chiffres  donnée  sont  loin 
<le  représenter  la  valeur  réelle  des  pêcheries  de  ces  Provinces. 

Les  dix-sept  millions  et  demi  de  piastres  plus  haut  mentionnées,  comme  valeur 
totale  de  nos  pêcheries  en  1883,  n'ont  donc  trait,  pour  ainsi  dire,  (]u'à  la  quantité  de 
poisson  préparé  pour  notre  commerce  d'exportation  et  pour  l'alimentation  de  quelques- 
iins  de  nos  marchés  de  l'intérieur.  Dans  ce  montant  ne  sont  pas  compris  les  cinq 
millions,  calcul  approximatif  de  la  valeur  du  poisson  capturé  et  consommé  par  la 
population  indigène  de  la  Colombie  Anglaise  et  de  Manitoba.  Et  dans  les  autres 
provinces  de  la  Confédération,  contenant  une  population  de  quatre  millions  d'habitants, 
pour  qui  le  poisson  est  un  des  principaux  articles  de  nourriture,  l'on  estime  que  la 
•quantité  du  poisson  consommé  est  d'au  moins  cent  livres  par  tête,  ce  qui  donnerait 
quatre  ants  millions  de  livres,  qui,  à  trois  contins  seulement  par  livre,  produirait  une 
somme  de  douze  viiUions  de  piastres.  Ajoutant  à  la  valeur  du  poisson  préparé  pour  le 
commerce,  celle  du  poisson  ca}>turé  pour  la  consommation  locale,  nous  arrivons  à  un 
grand  total  de  trente-quatre  millions  et  demi  de  piastres,  valeur  du  produit  de  nos 
pêcheries  en  1883. 

Ces  chiffres  sont  éloquents  et  donnent  une  idée  de  la  richesse  immense  des  eaux 
•canadiennes. 

Mais  l'on  me  permettra  de  prouver  par  une  comparaison  que  les  pêcheries  de 
l'Amérique  Britannique  du  Nord  sont  les  plus  productives  du  monde  entier. 

L'Angleterre  et  les  Etats-Unis,  de  même  cjue  le  Canada,  possèdent  des  pêcheries 
trè«  étendues  et  réputées  aussi  très  productives-    Pour  mieux  faire  comprendre  la 


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richesse  de  nos  mers  extérieures  et  intérieures,  j'établirai  une  comparaison  entre  leurs 
produits  et  le  produit  des  pêcheries  anglaises  et  américaines. 

Le  Canada  a  clmjiumlr  mille  hommes  régulièrement  employés  à  la  pêche.  D'après 
les  derniers  rapports  statistiques  que  nous  avons  sur  ce  sujet,  le  travail  de  ces  cin- 
quante mille  hommes  a  produit  dix-sept  millions  et  demi  de  piastres;  ou  trois  cent 
cinquante  piastres  pour  cluKiue  pêcheur. 

L'Angleterre,  pour  l'exploitation  de  ses  pêcheries,  emploie  cent  treize  mille  six  cent 
(mirante  hommes,  dont  \i\  travail,  d'après  les  données  fournies  par  Son  Altesse  Royale 
le  Duc  d'Edinburgh,  dans  son  intéressante  étude  sur  les  pêches  de  la  Grande  Bretagne,, 
produit  annuellement  six  cent  quinze  mille  tonneaux  de  poisson,  représentant  une  valeur 
de  trente-cinq  millions  de  j^iastres,  ou  trois  cent  neuf  piastres  pour  chaipie  pêcheur. 

Différence  en  faveur  des  pêcheries  canadiennes  sur  les  pêcheries  anglaises  :  <i\M.t- 
rante  et  une  piastres  par  cha(jue  homme. 

Les  statisti<iues  américaines  de  1882,  nous  disent  que  cent  trente-deux  mille  hommes 
s'occupent  de  l'exploitation  des  pêcheries  de  la  républiciuo  voisin».  Le  travail  de  ces 
cent  trente-deux  mille  homme  a  produit  quarante-quatre  millions  et  demi  de  piastres,  ou 
trois  cent  trente-sept  piastres  ])our  cliac^ue  pêcheur. 

Différence  en  faveur  des  pêcheries  canadiennes  sur  les  pêcheries  américaines  : 
treize  piastres  par  chaque  pêcheur. 

Et  il  n'est  certes  pas  téméraire  de  dire  qu'une  bonne  partie  de  ces  quarante-quatre 
millions  et  demi  de  piastres  produites  par  les  pêcheurs  américains,  a  été  empruntée 
aux  eaux  canadiennes. 

Remarquons  que  je  mets  de  côté  dans  cette  comparaison  3,000  milles  de  côtes 
maritimes  sur  l'Océan  Pacifique,  dont  les  richesses  ne  nous  sont  pas  encore  connues, 
pour  lesquelles  nous  n'avons  aucune  statisti(|ue,  parce  (jue  ce  vaste  champ,  de  même 
que  les  mers  intérieures  alimentant  l'Océan  Arcticpie,  n'ont  pu,  faute  de  bras,  être 
exploitées  jusqu'à  présent. 

Ce  n'est  donc  (\ne  la  moitié  environ  de  l'étendue  d»^  nos  pêcheries  qui  entre  en 
comparaison  avec  la  totalité  des  pêcheries  anglaises  et  américaines. 

N'oublions  pas,  non  plus,  que  par  suite  de  la  rigueur  du  climat  canadien,  nous  ne 
pouvons  exploiter  nos  pêcheries  que  pendant  environ  sept  mois  de  l'année:  du  com- 
mencement d'avril  jusqu'à  la  lin  d'octobre;  tandis  que  les  anglais  et  les  américains^ 
pèchent  du  mois  de  janvier  au  mois  de  décembre  ;  de  sorte  que,  dans  l'espace  de  sept 
mois,  le  pêcheur  canadien  gagne  quarante  et  une  piastres  de  plus  que  le  pêcheur 
anglais  et  treize  piastres  de  plus  que  le  pêcheur  américain  qui  travaillent  toute  l'année. 

Ce  qui  {îrécède  suffirait  amplement  pour  me  justifier  d'avoir  dit  que  nos  pêcheries 
étaient  les  plus  riches  dn  monde  entier. 

Pourtant,  dans  cette  comparaison,  je  n'ai  rien  dit  de  la  perfection  des  engins  de 
pêche  employés  par  nos  voisins  et  par  les  pêcheurs  de  la  mère  patrie,  des  millions  de 
piastres  affectées  chaque  année  par  les  américains  et  par  les  anglais  à  la  construction 
de  bateaux-pêcheurs  toujours  de  plus  en  plus  améliorés  et  de  dimensions  de  plus  en 
plus  grandes,  des  sociétés  patronnées  par  leurs  gouvernements  dans  le  but  de  perfec- 
tionner davantage  le  mode  de  pêche  et  d'encourager  le  pêcheur  en  augmentant  le 
produit  de  son  travail. 

En  1882,  à  part  environ  mille  vaisseaux  pontés,  dont  la  capacité  totale  ne  dépasse 
pas  quarante  mille  tonneaux,  nou.s  n'avions  au  service  de  nos  pêcheries  maritimes 
que  des  petits  bateaux  ouverts,  bien  faits,  sans  doute,  solidement  bâtis,  les  meilleurs 
du  monde,  peut-être,  en  leur  genre,  mais  avec  les(|uels  cependant,  nos  pêcheurs,  tout 
hardis  et  tout  habiles  qu'ils  soient,  ne  peuvent  s'aventurer  sur  la  haute  mer  sans 
danger,  sont  dans  l'impossibilité  de  suivre  le  poisson  dans  ses  migrations  fré(iuentes  et 
conséquemment  ne  peuvent  donner  à  nos  pêcheries  tout  le  développement  dont  elles 
sont  susceptibles. 

Tous  ceux  qui  ont  fait  une  étude  sérieuse  de  cette  question,  sont  d'opinion  que 


loin  d'avoir  atteint  le  maximum  do  leur  développemant,  les  pêcheries  du  Canada  n'ont 
pas  encore  jusqu'ici  dépassé  vingt-cinq  par  cent  de  ce  (ju'elles  f)euvent  produire. 

Cette  énorme  capacité  d'extension,  ressort  évidemment  du  fait  ([ue  nous  avons 
des  millions  de  milles  de  côtes  maritimes  non  encore  exijloitées  et  que  les  pêcheurs 
des  autres  pays  viennent,  tous  les  ans,  cueillir  dans  nos  eaux  une  moisson  très  abon- 
dante dont  il  n'est  fait  aucune  mention  dans  les  rapports  officiels  de  notre  ministère 
des  pêcheries. 

La  flotte  de  pêche  américaine,  sans  compter  plusieurs  milliers  de  bateaux  de 
moindres  dimensions,  se  compose  de  six  mille  six  cents  goélettes  d'une  capacité  de  deux 
cent  neuf  mille  tonneaux  ;  et  trente-deux  mille  dx  cent  soixante  et  dix-h  lit  bateaux- 
pêcheurs  anglais,  tous  de  dimensions  considérables,  et  dont  bon  nombre  de  bateaux  à 
vapeur,  sillonnent  en  tous  sens  les  mers  qui  entourent  le  Royaume-Uni. 

Les  armateurs  de  ces  pays  ne  reculent  devant  aucune  dépense  d'exploitation,  et 
leurs  pêcheurs,  montés  sur  des  bateaux  commodes  et  sûrs,  peuvent  suivre  le  poisson 
partout,  s'aventurer  sans  danger  loin  des  côtes  et  profiter  de  toutes  les  occasions  de 
faire  une  bonne  capture.  Une  ligne  régulière  de  petits  Ijateaux  à  vapeur  fait  le  service 
entre  la  flotte  de  l)ateaux-pêcheurs  et  les  villes  échelonnées  de  chaque  côtés  de  la 
Manche  ;  et  le  pécheur,  sans  perdre  un  temps  précieux,  peut  disposer,  sans  trouble  et 
avec  profit,  du  produit  de  son  travail. 

Les  gouvernements  anglais  et  américains,  de  même  que  les  capitalistes  de  ces 
pays,  comprenant  toute  l'inportance  de  leur  pêcheries  comme  contribution  à  la  ri- 
chesse nationale,  encouragent  par  tous  los  moyens  possibles,  ceux  qui  sont  engagés 
dans  leur  exploitation.  i)es  sociétés  ayant  à  leur  tête  les  savants  les  plus  éminents, 
les  hommes  les  plus  influents  et  les  pins  pratiques,  se  forment  pour  chercher  les  mo- 
yens de  rendre  la  pêche  de  plus  en  plus  productive.  Des  commissions  royales  sont 
nommés  pour  l'enquérir  des  besoins  des  populations  maritimes,  protéger  leurs  intérêts, 
rendre  plus  productif  leur  travail.  Mettant  de  coté  toute  mesquine  considération 
politique,  les  gouvernements  s'entoureut  des  hommes  les  plus  compétents  et  dont  les 
connaissances  peuvent  aider  au  développement  de  cette  importante  industrie.  Des 
havres  de  refuge  construits  à  frais  énormes,  sont  élevés  pour  protéger  les  points  les 
plus  exposés  des  côtes.  Des  phares  en  grand  nombre  indiquent  l'entrée  des  ports  et 
des  associations  do  sauvetage  sont  organisées  partout  ou  le  besoin  s'en  fait  sentir. 

Malgré  tous  ces  encouragements,  cependant  les  chift'res  sont  là  pour  prouver  que 
les  pêcheries  anglaises  et  américaines  ne  sont  pas  aussi  productives  que  les  pêcheries 
canadiennes. 

Je  suis  heureux  de  constater  ici  que,  grâce  à  l'encouragement  donné  par  nos 
hommes  publics  pendant  les  dernières  années,  la  construction  de  vaisseaux  pêcheurs 
fait  chez  nous  de  rapides  progrès.  Déjà  les  fines  goélettes  de  la  Nouvelle-Ecosse,  du 
Nouveau  Brunswick  et  des  autres  provinces  maritimes  rivalisent  avantageusement 
par  leurs  qualités  nautiques  avec  les  bateaux  pêcheurs  américains  réputés  les  meilleurs 
dn  monde. 

Les  bateaux  à  vaj^eur,  employés  déjà  pour  la  pêche  sur  nos  grands  lacs,  figureront 
bientôt,  sans  doute,  parmi  les  embarcations  destinées  aux  grandes  pêclies  maritimes. 

Notre  gouvernement  consacre  tous  les  ans  de  jolies  sommes  à  la  construction  de 
havres  de  refuge,  érection  de  phares  pour  la  guidance  des  pêcheries  et  autres  amé- 
liorations. 

Cent  cinquante  mille  piastres  sont  payées  comme  prime  aux  pêcheurs  comme 
titres  d'encouragement,  et  si  notre  gouvernement  veut,  dans  la  mesure  des  moyens  à 
sa  disposition,  continuer  à  aider  au  développement  de  cette  industrie  qui,  pour  l'avenir 
de  la  Confédération  est  d'une  importance  vitale,  il  nous  est  permis  d'esi)érer  que  dans 
un  avenir  prochain,  nous  n'aurions  rien  à  envier  à  nos  frères  d'outre-mer  ni  à  riches 
voisins. 

Espérons  que  le  gouvernement  de  la  Puissance,  mu  par  l'exemple  que  lui  donnent 
tous  les  pays  possédant  des  pêcheries  de  quelqu'importanco,  va  donner  à  cette  question 
toute  l'attention  qu'elle  mérite  ;  car  comme  le  dit  si  bien  la  "  gazette  de  Montréal  "  du 


8 


4  Février  1884  :  "L'histoire  de  toutes  les  grandes  nations  maritimes  prouve  claire, 
ment  l'inportance  incalculable  do  pêcheries  aussi  riches  que  les  pêcheTies  canadionnes- 
comme  aide  à  la  colonisation  et  au  commerce,  comme  source  où  une  population  peut 
aller  puiser  une  partie  de  la  nourriture  nécessaire  â  sa  subsistance  et  comme  école  |)our 
l'éducation  do  marins  habiles  et  hardis.  Nous  trouvons  dans  les  histoires  de  France, 
de  Hollande  et  d'Angleterre,  les  exemphs  frappants  des  bénéfices  immences  que  ces- 
nations  ont  retiré  do  l'exploitation  de  leurs  pêcheries  maritimes.  N'est-ce  pas  à  l'ex- 
ploitation de  ses  pêcheries  le  long  d'une  des  côtos  les  exposées  et  les  plus  dangereuses 
du  monde,  n'est-ce  nas  à  une  ex{)érienee  journalière  du  danger  dans  un  petit  bateau 
de  pêche,  que  l'Angleterre  doit  l'habileté  et  la  bravoure  proverbiale  de  ses  marins,  qui 
sont  l'admiration  des  autres  pays  et  la  terreur  des  ennemis  de  la  grande  Bretagne  ?■ 
C'est  la  familiarité  avec  le  danger  qni  enhardit  le  marin  et  c'est  précisément  ce  ({ui 
explique  pourcjuoi  les  pêchenrs  des  Provinces  maritimes  du  Canada  se  sont  acquis  une 
réputation  très  enviable  d'habilité  et  de  sang-froid  parmi  les  marins  des  autre» 
nations.  " 


III 

Les  pêcheries  canadiennes  no  sont-elles  i)as  susceptibles  d'épuisement?  Serait-iî 
prudent  d'engager  de  fortes  sommes  dans  leur  exploitation  ? 

Une  question  se  présente  ici  naturellement  à  l'esprit  du  lecteur  :  Est-il  ou  serait-ii 
sage,  d'engager  de  grands  capitaux  dans  l'exploitation  des  pêcheries  canadiennes,  et 
ces  pêcheries  ne  s'épuiseraient-elles  pas  rapidement  si  elles  étaient  exploitées  sur  uno 
plus  grande  échelle  ? 

Tous  ceux  qui,  soit  en  Europe,  soit  en  Amérique  ont  fait  une  étude  si^ciale  et  ap- 
profondie de  cette  importante  question,  semblent  être  d'opinion  unanime  pour  ad- 
mettre qu'une  pcche  aveugle  et  non  raisonnée,  en  toutes  saisons  et  avec  toutes  espèces- 
d'appareils  peut  épuiser  et  même  faire  disparaître  certains  poissons  tels  que  le  saumon, 
la  truite,  lo  poisson  blanc,  l'éturgeon  et  autres  poissons  d'eau  douce,  de  même  que  les 
huitres,  les  homards  et  autres  crustacés. 

Il  est  en  conséquence  bon  d'assujétir  la  pêche  de  ces  poissons  à  des  restrictions- 
judicieuses,  même  à  des  règlements  sévère?. 

Nos  hommes  publics  l'ont  compris,  et  à  l'abri  des  sages  règlements  auxquels  elles 
sont  soumises,  nos  pêcheries  intéiieures  continueront,  pendant  des  années  et  de» 
années  encore,  à  enrichir  ceux  qui  les  exploitent. 

Quant  à  ces  poissons  qui  donnent  surtout  de  l'iniportancîo  à  nos  j^êches  maritimes,, 
qui  fournissent  le  plus  fort  contingent  t\  nos  exportations  et  que  nous  sommes  con- 
venus d'appeler  poissons  commerciaux,  tuls  que  la  morue,  le  hareng,  le  maquereau, 
etc.,  sans  prétendre  qu'il  faille  absolument  les  soustraire  à  toute  protection,  je  partage- 
l'avis  des  savants  et  des  patriciens  qui  disent  qu'il  est  pratiquement  impossible  de  les 
épuiser  par  les  moyens  actuellement  on  usage  pour  leur  capture. 

Depuis  trois  siècles,  différentes  pêches  se  prati(iuent  le  long  des  côtes  des  pro- 
vinces maritimes  et  dans  le  golfe  St- Laurent;  depuis  trois  cents  ans  et  au-delà,  nos 
pêcheurs,  les  pêcheurs  européens,  les  pêcheurs  américains  avec  leurs  appareils  les  plus- 
améliorés,  puisent  il  cette  source  ;  et  nonobstant  les  quantités  énormes  capturés,  ton.'* 
les  ans,  depuis  la  découverte  du  Canada,  aucun  signe  d'épuisement  se  manifeste-  Au 
contraire,  le  nombre  des  poissons  semble  augmenter;  de  vieux  pêcheurs  nous  disent 
(^u'il  y  a  aujourd'hui,  sur  nos  bancs,  beaucoup  plus  de  morue  qu'autrefois  et  les  statis- 
tiques sont  là  pour  prouver  que  des  millions  viennent  annuellement  s'ajouter  aux  mil- 
lions déjà  produits. 

Dans  certaines  localités,  le  poisson  n'est  peut-être  pas  aussi  abondant  à  une  époque 
donnée,  mais  cela  est  dû  à  des  causes  purement  accidentelles.  Il  faut  tenir  compte 
des  variations  delà  température,  des  courants  et  de  la  dispaiition  des  myriades  de 
petits  poissons  servant  de  nourriture  a,UK  gadus  ;  de  même  qu'il  ne  faut  pas  oublier 


9 


<Hie  le  poisson  est  très  capricieux  dans  ses  migrations,  et  qu'il  se  portera  on  grande 
abondance  aujourd'hui  là  où  il  n'avait  pus  fait  son  apparition  depuis  plusieurs  années. 

D'ailleurs,  cette  diminution  inoidentelle  du  poisson  le  long  de  certaines  cAtes  ma- 
ritimes, ne  sj  fait  j-énérulement  romariiuer  que  sur  une  étendue  comparativement  très 
limitée  de  nos  fonds  de  pêche. 

De  plus,  l'énorme  fécondité  de  la  morue,  du  hareng  et  du  maquereau,  la  quantité 
infiniment  i)etite  tuée  par  l'homme,  comparée  à  la  destruction  causée  parmi  eux  par 
les  ennemis  naturels  de  ces  poissons,  nous  enlèvent,  pour  ainsi  dire,  toute  idée  qu'ils 
puissent  être  détruits  ou  diminués  en  nombre  par  la  pêche- 
Une  commission  royale  anglaise,  ayant  pour  j)résident  le  célèbre  professeur  Huxley 
et  composée  de  savants  et  d'hommes  éminemment  pratiques,  après  une  étude  sérieuse 
et  approfondie  de  cette  question,  a  déclaré,  en  1882,  que  malgré  les  quantités  énormes 
toujours  croissantes  de  poissons  annuellement  capturés,  depuis  des  siècles,  le  long  das 
<'ôtes  d'Angleterre,  les  pêcheries  britanniques  ne  donnaient  encore  aucun  signe  d'épui- 
sement. 

En  présence  de  faits  de  cette  nature,  nous  basant  sur  les  écrits  de  grand  nombre 
il'homiT'es  distingués,  spécialistes  et  praticiens,  ne  pouvons-nous  pas  assurer,  que  pen- 
-dant  des  siècles  à  venir,  à  moins  d'un  grand  bouleversement  de  la  nature,  les  pêcheries 
<lu  Canada  seront  pour  les  capitalistes  entreprenants  et  énergicjues,  un  vaste  champ 
d'exploitatioh  productif  et  fertile  ? 

Nous  disons  :  "  A  moins  d'un  bouleversement  dans  la  nature  ;  "  il  existe  en  eflfet 
■dans  la  nature  de  grandes  lois  de  compensation.  Tandis  que  certaines  parties  de  notre 
planète,  favorisées  d'un  climat  agréable,  se  couvrent,  chaque  année,  de  riches  mois- 
sons, produisent  les  fruits  les  plus  beaux,  les  plus  succulents  et  les  plus  variés,  la  Pro- 
vidence, dans  sa  sagesse  divine,  a  donné  aux  régions  du  nord,  peu  propres  à  toutes 
sortes  de  culture  et  privées  des  faveurs  accordées  aux  pays  chauds,  des  mers  fourmil- 
lant de  poissons  d'espèces  différentes  et  oflfrant  aux  habitants  de  ces  régions  une  nour- 
riture abondante  en  même  temps  qu'un  excellent  moyen  de  subsistante. 

La  morue,  le  hareng  et  le  maquereau,  surtout  la,  première,  fréquentent  de  préfé- 
rence les  mers  froides  qui  sont,  jusqu'à  un  certain  point,  essentielles  à  leur  existence. 
Le  courant  arctique  qui  arrose  les  côtes  du  Canada,  est  la  source  des  immenses  riches- 
ses ichthyologiques  auxqitelles  nous  puisons  depuis  la  découverte  de  notre  pays  et  qui 
promettent  d'être  toujours  aussi  productives  (pie  lors  des  premiers  jours  de  leur  exploi- 
tation, et  aussi  longtemps  que  ce  courant  froid  subsistera,  car  il  apporte  avec  lui  la 
nourriture  au  moyen  de  laquelle  tous  nos  poissons  vivent,  se  propagent  et  gran- 
dissent. 

Messieurs  Hatton  et  Hervey,  dans  letir  intéressante  "Histoire  de  Terreneuve," 
nous  disent  :  "  Le  courant  arctique  qui  arrose  les  côtes  du  Labrador,  de  Terreneuve, 
du  Canada  et  d'une  partie  des  Etats-Unis,  refroidissant  l'atmosphère  et  traînant  avec 
lui  d'immenses  champs  de  glace,  est  la  source  des  grandes  richesses  maritimes  aux- 
quelles les  populations  de  ces  pays  pourront  puiser  jjendant  des  siècles  à  venir.  Si  ce 
courant  froid  faisait  tout-à-coup  défaut,  la  morue,  le  hareng,  le  maquereau,  le  flétan,  le 
loup-marin,  etc.,  etc.,  qui  aujourd'hui  affluent  dans  les  mers  du  nord,  disparaîtraient 
entièrement.  Les  grands  intérêts  maritimes  dépendent  donc  autant  du  courant  arc- 
tique, que  les  intérêts  agricoles  de  la  pluie  et  du  beau  temps." 

Chargé  de  banquises  et  de  champs  de  glace,  le  courant  arctique  se  précipite  des 
mers  du  Spitzberg,  tourne  rapidement  le  cap  Farewell,  l'extrémité  sud  du  Groenland, 
monte  au  nord  jusqu'au  Cap  York,  et  déviant  vers  l'ouest,  se  mêle  aux  eaiixf  roides  des 
rivières  venant  des  contrées  arctiques  par  le  Détroit  de  Davis.  De  là  il  se  dirige  vers 
le  sud,  et  recevant  une  nouvelle  force  des  eaux  de  la  Baie  d'Hudson,  il  se  précipite  le 
long  du  Labrador  et  de  Terreneuve  jusqu'à  ce  qu'il  rencontre  les  eaux  chaudes  du 
^'  Gulf  Stream,'"  se  dirigeant  vers  l'est.  Ici  il  se  divise  en  deux  parties,  l'une  coulant 
■entre  le  "  Gulf  Stream  "  et  la  côte,  l'autre  se  déchargeant  en  dessus  des  eaux  chaudes 
de  cette  seconde  rivière  de  l'océan.  Du  Labrador  en  allant  au  sud,  il  prend  le  nom  de 
"'  courant  du  Labrador,"  et  la  superficie  qu'il  couvre  le  long  des  côtes  de  l'Amérique  du 
-Nord,  est  l'endroit  par  excellence  où  les  poissons  de  mer  viennent  frayer  et  chercher 


10 

leur  nourriture.  Car,  quoique  la  température  particulière  du  courant  du  Labrador 
soit  nécessaire  à  la  croissance  de  nos  poissons  commerciaux,  ce  n'est  cependant  pas 
uniquement  à  cause  de  cette  température  que  ces  poissons  s'y  pressent,  mais  aussi  et 
surtout  parce  qu'ils  y  trouvent  une  abondance  de  nourriture  qui  ne  peut  jamais 
manquer. 

Les  mers  Arctiques  et  les  rivières  qui  les  alimentent,  fourmillent  d'insectes  for- 
mant en  plusieurs  endroits,  dit  le  Professeur  Hind,  "  une  masse  grouillante,  un  océan 
de  limon  vivant,  qui  donnent  une  solution  à  ce  problème  qui  s'est  bien  souvent  présenté 
à  l'esprit  de  ceux  qui  s'occu^îent  de  pêches  maritimes,  savoir:  "  De  quoi  se  nourrissent 
les  innombrables  millions  de  poissons,  grands  et  petits,  qui  se  pressent  sur  les  côtes  du 
Canada,  de  Terreneuve  et  des  Etats- l'nis." 

Le  docteur  Brown  a  démontré  que  de  ce  limon  vivant,  couvrant  des  centaines  de 
milles  carrés,  se  nourrissent  également  des  myriades  d'oiseaux  aquatiques  qui,  pendant 
la  saison  d'été,  fré(iuentent  les  mers  du  Nord. 

Ce  courant  du  Labrador,  demeure  «le  la  morue  et  autres  poissons  contribuant 
surtout  à  l'augmentation  do  notre  conimerce,  couvre  uue  vaste  étendue  des  mers  de  la 
Confédération  Canadienne  en  dedans  des  cent  brasses  d'eau.  L'on  calcule  que  la 
superficie  des  côtes  des  Etats-Unis  arrosées  par  ce  courar.t,  est  de  quarante-cinq  mille 
millcis  carrés  tandis  qu'il  occupe  deux  cent  mille  milles  carrés  des  mers  canadiennes. 
De  là  l'immense  supériorité  des  pêcheries  canadiennes  sur  les  pêcheries  américaines, 
puisqu'il  est  admis  j)ar  tous  les  auteurs,  que  le  courant  artique  est  le  home  des  poissons 
commerciaux  et  ({ue  la  presque  totalité  de  ce  courant  arrose  les  côtes  du  Canada. 

Personne  ne  s'arrête  maintenant  à  l'ancienne  théorie  de  la  migration  des  poissons 
fréquentant  nos  côtes,  aux  mers  Arctiques  ou  autres  régions  éloignées.  La  présence 
ou  l'absence  de  nourriture,  l'instinct  de  la  reproduction,  la  température  de  l'eau,  sont 
les  causes  qui,  déterminent  leurs  mouvements.  Généralement  ils  se  meuvent,  en 
bancs  immenses,  à  la  recherche  de  nourriture  ou  de  lieux  propres  à  la  reproduction  do 
leur  espèce,  des  eaux  profondes  de  la  haute  mer  aux  eaux  plus  chaudes  des  côtes,  et 
ils  retournent  par  le  même  chemin,  en  ligne  droite,  à  leur  Jinhitaf.  Tous  les  natura- 
listes nous  disent  (lue  le  poisson  revient  au  lieu  de  sa  naissance,  lorsque  la  nature  l'a 
mûri,  pour  frayer  à  son  tour  ;  et  le  poisson  capturé  sur  une  certaine  étendue  de  côtes, 
est  indigène  à  ces  côtes  ou  aux  rivages  adjacents.  Ainsi,  durant  les  mois  d'hiver  l'on 
capture  du  hareng  et  autres  poissons  de  mer,  le  long  des  côtes  des  Provinces  Maritimes 
de  la  Confédération. 

J'ai  appuyé  sur  cette  question.  Je  voulais  proiiver  ce  que  j'ai  avancé  en  premier 
lieu,  savoir:  que  les  pêcheries  maritimes  du  Canada  sont  dans  un  sens,  inépuisables 
et  que  les  capitalistes  peuvent,  en  toute  sûreté  les  exploiter  sur  une  large  échelle. 

IV 

LES  FONDS  DE  PECHE  LES  PLUS  IMPORTANTS  ET  LES  PLUS  RICHES 

DU  CANADA. 


i 


Les  pêcheries  du  Canada  i)euvent  se  diviser  en  deux  grandes  catégories  :  les  pêches 
maritimes,  et  les  pêches  d'eati  douce,  ou  pêches  de  lacs  et  de  rivières. 

Les  premières  étant,  de  beaucoup,  les  plus  importantes,  à  tous  les  points  de  vue, 
nous  leur  donnerons  la  préséance. 

L'insuffisance  de  notre  population  et  d'autres  causes  encore,  ne  nous  ont  pas 
permis,  jusqu'à  présent,  d'exploiter  plus  de  la  moitié,  ou  environ,  du  vaste  champ 
maritime  à  notre  disposition.  Nous  sommes  encore  loin  de  connaître  toutes  les 
richesses  des  eaux  (pii  bordent  la  Colombie  Anglaise  et  des  mers  intérieures  de  cette 
importante  partie  de  la  Confédération.  Cependant,  des  ra[)ports  officiels,  basés  sur 
des  inspections  minutieuses  et  des  expériences  pratic^ues,  nous  disent  que  dans  ces 
eaux  abondent  les  poissons  commerciaux  les  plus  précieux  et  d'espèces  variées  ;  et  tout 


11 

porte  à  croire  que  les  eaux  du  Pacifique  ne  le  cèdent  pas  en  richesse  à  celles  mieux 
connues  de  l'Atlantique. 

Nos  fonds  de  pêche  connus,  les  plus  riches  et  les  plus  fréciuentés,  comprennent 
toutes  les  côtes  de  la  Nouvelle-Ecosse  arrosées  par  l'Océan  Atlanticjue,  de  la  Baie  de 
Fundy  jusfiu'à  l'extrémité  sud  de  cette  Province,  et  les  alentours  des  îles  du  Cap 
Breton  et  du  Prince-Edouard  ;  embrassent  toute  hi  Baie  des  Chaleurs  et  les  côtes  du 
district  de  Gaspé — 280  milles — et  s'étendent  jusqu'à  l'Ile  d'Anticosti,  le  Labrador  et  les 
Iles  de  la  Madeleine. 

"  Aucune  autre  partie  du  monde,"  nous  dit  P.  L.  Simmons  dans  sou  intéressant 
ouvrage  sur  "  Les  produits  de  la  mer  "  ne  possède  des  pêcheries  maritimes  aussi  riches 
et  aussi  étendues  que  celles  que  renferme  le  Golfe  St.  Laurent.  La  nature  y  entasse 
une  immense  variété  de  tous  ces  poissons  oflrant  à  l'homme,  non  seulement  une 
nourriture  saine  et  substantielle,  mais  aussi  des  moyens  de  subsistance  sûrs  et  rému- 
nératifs  et  un  aliment  à  son  esprit  d'initiative  et  d'industrie." 

Aux  endroits  que  nous  venons  d'énumérer,  tant  sur  la  haute  mer  que  dans  chaque 
baie,  havre,  anse  et  bras  de  mer  se  reliant  au  Golfe  St.  Laurent  ou  il  l'Océan  Atlan- 
tique, se  font  activement  et  avec  beaucoup  de  succès,  les  pêches  tl  la  morue,  au  hareng, 
iiu  maquereau,  au  homard,  etc.,  etc.  ;  et  dans  lee  hommes  qui  montent  nos  bateaux- 
]iêcheurs,  le  Canada  possède  les  éléments  d'une  puissante  marine  qui  fera  sa  force  en 
lemps  de  danger. 


PECHE  A  LA  MORUE. 

De  toutes  les  pêches  maritimes  du  Canada,  In.  plus  importante,  de  beaucoup,  est 
la  pêche  à  la  morue.  Elle  emploie  des  milliers  de  bras  et  fournit  le  plus  fort  conti- 
nent ù  notre  commerce  d'exportation  de  poisson. 

A  la  Nouvelle-Ecosse,  au  Nouveau-Brunswiok  et  dans  la  partie  inférieure  de  la 
Province  de  Québec  elle  constitue  une  des  insdustries  les  plus  importantes. 

En  1883,  les  pêcheurs  canadiens  ont  pris  et  préparé  pour  le  commerce,  un  million, 
dx  cent  onze  mille,  c^nq-cent  quatre-vingt  seize  quintaux  de  morue,  égaux  en  valeur  ù,  six 
millions,  troifi  ecnl  sortante  et  six  mille  piastres. 

A  cela,  il  convient  d'ajouter  :  dexix  cent  quarante  cimi  mille,  quatre  cent  cinquante-trois 
livres  de  morues  et  langues  de  morue  et  trois  cent  trente-trois  mille,  trois  cent  onze  gallons 
d'huile,  valant  un  quart  de  million  de  piastres  et  nous  donnant  pour  les  produits  de 
la  pêche  à  la  morue,  un  grand  total  de  six  millions  six  cent  seize  mille  piastres  divisé 
comme  suit  entre  les  difl'érentes  Provinces  maritimes  de  la  Confédération,  viz  : 

Nouvelle-Ecosse $3,977,599  00 

Québec 1,778,290  00 

Nouveau-Brunswick 716,496  00 

lie  du  Prinde-Edouard 144,170  00 

$6,616'555  00 

Dans  cette  somme  de  $6,616,555,  ne  sont  pas  comprit!  les  millions  de  livres  de 
ïnorue  consommées  sur  place  par  les  vingt  mille  familles  de  pêcheurs  <iuo  cette  indus- 
trie fait  vivre. 

La  morue,  conduit  par  cet  instinct  qui  guide  tous  les  êtres  animés,  fait  son  appa- 
rition sur  les  côtes  canadiennes  ù  des  dates  incertaines,  généralement  du  quinzième  jour 
de  mai  au  commencement  du  mois  de  juin,  quelquesfois  dans  les  derniers  jours  du 
mois  d'avril  et  (pielquesfois  aussi,  mais  rarement,  pas  avant  la  dernière  quinzaine  de 
juin.  (Jes  variations  do  quelques  iours  ou  quelques  semaines  dans  l'époque  de  l'arri- 
vée de  la  morue,  ont  iK)ur  causes,  les  courants,  les  vents,  la  température  ce  qui  déter- 


12 


I  i 


minent  les  migrations  vers  nos  côtes  des  nombreuses  variétés  de  petits  poissons  dont 
se  nourrit  le  gadus. 

L'on  rencontre  la  morue  en  bien  plus  grande  abondance  dans  certaines  localités- 
offrant  plus  d'avantages  pour  l'éclosion  et  la  préservation  du  frai.  Immédiatement 
après  avoir  déposé  ses  oeufs,  elle  se  rend  sur  les  bancs  ou  haut-fonds  où  elle  trouve  en 
abondance  la  nourriture  nécessaire  pour  rassasier  son  appétit  vorace.  Vers  le  moiS' 
de  décembre,  elle  quitte  les  côtes  et  les  bancs  qui  les  avoisinent  pour  se  retirer  à  la 
haute  mer. 

La  saison  de  la  pêche  à  la  morue  varie  dans  les  différentes  Provinces  maritimes, 
commençant  plus  tôt  à  la  Nouvelle-Ecosse  et  au  Nouveau-Brunswick  où  le  climat  est 
moin;?  sévère  que  dans  la  Province  de  Québec.  Généralement,  les  bateaux  prennent 
la  mer,  en  avril  à  la  Nouvelle-Ecosse  et  au  Nouveau-Brunswick,  en  mai  à  Québec,  et 
la  canjpagne  se  termine  an  mois  de  novembre. 

Le  hareng  et  le  caplan,  avant-coureurs  de  la  morue,  nous  annoncent  chaque  prin- 
temps l'arrivée  de  cette  dernière. 

Le  caplan  est  un  joli  petit  poisson  de  sept  à  huit  pouces  de  longueur  qui  chaque 
printemps,  nous  arrive  en  masses  compactes,  remplissant  pour  ainsi  dire,  chaque  bai© 
et  chaque  auso  formée  par  la  nature  accidentée  des  côtes.  Après  un  séjour  de  six  ou 
sept  semaines  près  des  rivages  où  il  vient  frayer,  il  disparait  et  va  chercher  une  re- 
traite dans  les  profondeurs  do  la  mer  où  il  demeure  jusqu'à  l'époque  du  frai  l'année 
suivante. 

Durant  tout  le  temps  que  le  caplan,  en  bancs  immenses,  se  presse  le  long  des  côtes, 
la  morue  qui  suit  do  près,  festoie,  dévore  des  ^millions  de  ces  petits  poissons  et  peut 
satisfaire  la  voracité  bien  connue  de  son  appétit.  Aussi  le  temps  du  caplan  est-il  tou- 
jours pour  le  pêcheur  le  temps  par  excellence,  car  il  est  assuré  d'une  riche  moisson 
"tant  «lu'il  i)eut  oti'rir  pour  ajjpùt  à  la  morue  ce  petit  poisson  dont  elle  est  très  friande. 

Pendant  tout  le  temps  qtie  dure  le  caplan,  chaque  établissement  de  pêche  un  peu 
considérable,  emploie  deux  ou  trois  bateaux,  montés  chacun  par  sept  hommes  appelé» 
Seineurs.  Jour  et  nuit  ces  bateaux  parcourent  les  côtes  à  la  recherche  du  caplan.  Ren- 
contre-t-on  un  banc  de  ce  poisson,  de  suite  la  seine  est  jetée,  le  bateau  est  chargé,  et  les 
Seineurs  font  force  do  rames  pour  arriver  le  plus  tôt  possible  à  l'établissement  et  distri- 
buer frais,  aux  pêcheurs,  le  caplan  capturé  ;  chaque  bateau  pêcheur  recevant  une  part 
égale  du  poisson  ainsi  apportée  par  les  Semeurs. 

Los  bateaux  pêcheurs  de  grandes  dimensions,  employés  à  la  pêche  à  la  morue  sur 
les  bancs  et  à  la  haute  mer,  sont  obligés  de  venir  de  temps  à  autre  dans  les  hdvree  et 
baies  pour  y  capturer  du  caplan  frais.  Ils  en  prennent  de  grandes  quantités,  suffisantes- 
pour  l'appât  de  plusieurs  jours,  et  le  conservent  au  moyen  de  la  glace  ou  de  réfri- 
gérants. 

11  est  dillicile,  à  celui  qui  est  peu  au  fait  de  nos  pêches  maritimes,  do  se  faire  une 
idée  du  nombre  incalculable  de  caplan  qui  s'entassent,  chaque  printemps  dans  les  anses 
formées  par  les  rives  du  golfe  Saint-Laurent  Du  rivige,  un  homme  peut  en  quelques 
minutes,  avec  une  épuisotte,  remplir  une  charrette  de  ce  poisson  ;  et  dans  le  même 
espace  de  temp-,  quatre  ou  cinq  hommes,  avec  une  seine  ordinaire,  peuvent  charger  uu 
bateau  de  huit  à  dix  tonneaux. 

Au  dire  des  gourmets,  le  caplan  frais  est  délicieux,  et  lorsque  la  science  et  l'expé- 
rience auront  trouvé  les  moyens  de  le  préparer  de  la  même  manière,  ou  à  peu  près,, 
que  la  sardine  à  laquelle  il  ressemble  d'ailleurs,  ce  poisson  acquerra  une  haute  valeur 
commerciale  en  raison  des  quantités  immenses  qui  peuvent  être  capturées  presque 
sans  frais.  Déjà,  en  plusieurs  endroits  des  Provinces  Maritimes  des  quantités  consi- 
dérables de  caplan  sont  séchées,  soigneusement  mises  en  boîtes  et  envoyées  sur  les 
marchés  des  Etats-Unis  ;  et  cette  industrie  grandit  tous  les  ans  au  profit  de  ceux  qui 
l'exploitent. 

Vers  la  fin  de  juin,  lorsque  le  caplan  est  complètement  disparu  des  côtes,  l'on  offre 
à  la  morue,  comme  appât,  du  lançon,  du  hareng,  du  maquereau,  de  l'encornet,  de 
l'éperlan  et  difiérentes  espèces  de  mollusques. 


13 


la 


•t 


Le  lançon  et  l'éperlan  se  prennent  à  la  seine  de  la  même  manière  que  le  caplan,  le 
Iiareng  et  le  maquereau  au  moyen  de  filets  traînants  ou  fixes  et  l'encornet  avec  un 
engin  particulier  que  les  pêcheurs  nomment  turlutte,  morceau  de  plomb  rond,  long  de 
eix  pouces,  et  qui  à  l'une  de  ses  extrémités  possède  une  tête  garnie  d'épingles  recourbées. 
La  pêche  aux  mollus<)ues  se  fait  à  la  main,  ou  avec  des  râteaux,  sur  les  fonds  vaseux 
de  certaines  baies  et  do  certaines  rivières. 

La  pêche  à  la  morue  se  faisant,  en  Canada,  presqu'exclusivement  à  la  ligne,  à  la 
main  ou  à  la  ligne  de  fonds  ou  ligne  dormante,  le  coût  de  l'appât  [Ktiir  cette  pêche 
représente  chaque  année  une  somme  très  considérable,  et  qui,  sans  exagération,  peut 
être  comparée  à  un  quart,  au  moins,  de  la  valeur  totale  do  la  morue  capturée.  En 
outre,  l'appât  frais  est  presqu'indispensable  à  une  bonne  prise,  et  tous  les  ans,  les 
pêcheurs  canadiens  perdent  un  temps  précieux  pendant  la  meilleure  saison  de  pêche, 
parce  qu'ils  ne  peuvent  pas  toujours  offrir  à  la  morue  une  boitte  fraîche.  Il  serait  donc 
très  désirable  et  bien  important  que  l'on  adoptât  des  moyens  de  diminuer  le  coût  de 
l'appât  et  la  perte  de  temps  qui  résulte  du  système  actuellement  eu  vigueur. 

La  Norvège,  qui,  de  toutes  les  contrées  de  l'Europe,  possède  les  pêcheries  à  la 
morue  les  plus  importantes  et  qui  fait  aux  produits  canadiens  une  concurrence 
sérieuse  sur  les  marchés  au  poisson  du  monde  entier,  est  parvenue,  à  l'aide  de  la 
science,  à  améliorer,  de  beaucoup,  son  système  de  pêche  pendant  ces  dernières  années. 

Les  pêcheurs  norvégiens  font  usage  sur  une  grande  échelle  et  avec  succès,  de  fileta 
fixes  pour  la  pêche  à  la  morue- 

Nos  voisins  des  Etats-L^nis,  prompts  à  faire  usage  de  tout  engin  amélioré  qu'ils 
n'inventent  pas  eux-mêmes,  se  servent  aussi  de  ces  filets  comparativement  peu  coûteux. 
Pourquoi  nos  pêcheurs  canadiens  n'imiteraient-ils  pas  cet  exemple  ? 

Suivant  de  récentas  statistiques,  de  vingt-six  mille  hommes  employés  à  la  pêche  à 
la  morue,  au  large  des  îles  Lafoten,  en  Norvège,  douze  mille  faisaient  usage  dh  filets  ; 
et  il  a  été  prouvé  que  ces  derniers  recueillaient  une  moisson  bien  plus  abondante  que 
ceux  péchant  à  la  ligne  à  la  main  ou  à  la  ligne  de  fonds. 

Un  journal  de  Gloucester,  dans  les  Etats-Unis,  relate  le  fait  que  le  12  décembre 
1882,  un  bateau-pêcheur,  monté  par  deux  hommes  seulement,  et  ayant  â  bord  sept  de 
ces  filets,  captura  cinq  mille  poissons  dans  une  seule  nuit. 

Monsieur  Jamçs  Feehan,  de  l'Ile  du  Prince-Edouard,  écrit  aux  journaux  de  cette 
Vrovince  pour  dire  qu'il  a  admirablement  bien  réussi  dans  la  pêche  à  la  morue  au  filet, 
capturant  en  moyenne  quinze  cent  â  deux  mille  morues  tous  les  jours. 

Espérons  donc  que  nos  pêcheurs  feront  bientôt  un  usage  général  de  ce  nouvel 
appareil  dont  l'emploi  produit  de  si  beaux  résultats  dans  les  autres  pays,  et  sauveront 
ainsi  un  temps  précieux  et  une  quantité  considérable  de  hareng,  maquereau  et  autres 
[Kjissons,  aujourd'hui  dépensés  comme  appât,  mais  qui  pourraient  être  expédiés  aux 
marchés  et  produire  de  jolies  sommes. 

On  pêche  la  morue  en  Canada,  soit  sur  les  grands  bancs  dans  les  vaisseaux  pontés 
\ariant  en  dimensions  de  soixante  à  cent  tonneaux,  soit  dans  lés  jxîtits  bateaux  ou- 
verts à  quehjues  encablures  du  rivage. 

La  Nouvelle- lOcosse  et  le  Nouveau-Bruswick  semblent  avoir  le  monopole  de  la 
pêche  dans  de  grands  bateaux  j  Je  suis  heureux  de  constater  ici  que  l'architecture 
navale  à  fait  des  progrès  sensibles  dans  ces  deux  Provinces  {xjndant  la  dernière 
décade.  Ce  mouvement  progressif  [permet  aux  pêcheurs  d'augmenter  considérable- 
ment la  prise  annuelle. 

Il  reste  encore,  cei)endant,  dans  ces  deux  Provinces,  bon  nombre  de  pêcheurs, 
surtout  parmi  ceux  qui  mènent  de  front  la  culture  et  la  pêche,  qui  exploitent  cette 
dernière  industrit»  dans  des  petits  bateaux  ouverts  à.  une  faible  distance  de  leurs 
habitations. 

De  dix  à  quinze  hommes  montent  les  vaisseaux  faisant  la  jMJche  sur  les  bancs  ;  ce 
nombre,  cependant  varie  suivant  les  dimensions  et  le  tonnage  du  bateau  i-)êcheur.  Gén6» 
ralement,  l'armateur  fournit  au  pêcheur  un  bateau  gréé  et  pourvu  do  tous  les  apparoilw 


u 


4e  pêches  nécessaires,  et  il  a  droit  à  la  moitié  de  la  i)rise,  plus  une  part  sur  l'autre 
aaioitié  que  l'on  nomme  "j^cirt  du  bateau  "  la  balance  est  divisée  entre  les  pêcheurs. 

Aussitôt  que  les  btUeaux  sont  arrivés  sur  les  fonds  de  pêche,  on  jette  l'ancre  dans 
vingt,  trente  ou  quarante  brasses  d'eau,  la  chaîne  qui  retient  l'ancre  étant  remplacée 
par  \in  câble  en  chanvre  ou  en  coton.  Chaque  soir  à  quelque  distance  du  bateau,  l'on  jette 
des  filets  en  bon  nombre  afin  de  se  procurer  de  la  boitte  fraîche  pour  la  journée  du 
lendemain,  et  la  pêche  à  la  ligne  de  fonds  commence  et  continue  sans  interruption, 
nuit  et  jour,  en  dépit  du  vent  et  la  mer,  jusqu'à  ce  que  la  cale  du  bateau  soit  remplie 
de  poissni  tout  tranché,  salé  et  prêt  pour  le  marché  ou  pour  les  manipulations  du 
séchage.  Alors  le  bateau  retourne  à  son  port  d'armement,  et  la  morue  est  débarquée 
et  expédiée  verte  ou  saunuirée  aux  marchés  des  Etats-Unis  et  de  l'intérieur  du  Ca- 
nada, on  bien  lavée,  sèchée  et  préparée  pour  l'exportation  en  Euroi)e,  aux  Antilles,  au 
Brézil,  etc. 

Si  la  chance  favorise  le  pêcheur,  si  la  morue  et  surtout  la  boitte,  sont  abondantes  à 
l'endroit  où  il  a  d'abord  jeté  l'ancre,  sa  cargaison  est  pronqitement  complétée  ;  mais 
quelquefois  la  morue  ne  donne  pas  là  où  l'on  s'est  d'abord  arrêté  ;  il  faut  chercher  de 
mouillage  ;  la  boitte  manque  :  il  faut  se  rendre  jusques  dans  les  havres  pour  s'en 
procurer  ;  tous  ces  mouvements  font  perdre  un  temps  précieux  et  retardent  l'heure  du 
retour  au  port  d'armement. 

Quoique  plus  coûteuse,  la  pêche  avec  de  grands  bateaux  pontés  est  bien  plus'pro- 
nMetive  que  celle  qui  se  i)ratiqne  le  long  des  côtes  sur  des  petits  bateaux  ouverts.  La 
morue  de  banc  est  aussi  beaucoup  plus  grosse  que  la  nwn(c  de  terre  ;  elle  est  en  outre  de 
i]ualité  supérieure  et  se  vend  un  prix  plus  élevé  sur  tous  les  marchés.  En  moyenne, 
trente  montes  de  banc  sèchées  sufiisent  pour  faire  un  quintal. 

Dans  la  Province  de  Québec  et  à  l'Ile  du  Prince  Edouard,  la  pêche  se  fait  pres- 
•^qu'entiorement  sur  des  bateaux  ouverts,  soit  dans  le  voisinage  des  anses  et  des  baies 
où  le  pêcheur  séside,  soit  sur  de  i)etits  bancs  à  dix,  vingt  ou  trente  milles  de  la  côte. 
Ces  bateaux,  les  meilleurs  de  leur  classe  peut-être  dans  le  monde  entier,  sont  cons- 
truits par  les  pêcheurs  eux-mêmes.  Leurs  dimensions  varient  de  vingt  à  trente  pieds 
de  largeur,  suivant  l'usage  auquel  ils  sont  destinés.  Ils  sont  fait  à  cZms  et  de  bois 
légers  tels  que  cèdre,  pin,  sapin,  etc.  Pointus  à  la  poupe  comme  à  la  proue,  leur 
uréement  consiste  généralemont  en  deux  voiles  à  baleston  et  un  foc  ;  quelques-uns  de 
ceux  qui  servent  à  la  pêche  sur  les  bancs  sont  grées  comme  de  petites  goélettes.  Afin 
que  l'on  puisse  facilement  les  tirer  de  l'eau  et  les  monter  sur  les  grèves,  advenant  une 
tempête,  ils  sont  comparativement  très  légers  ;  leur  tirant  d'eau  ne  dépasse  pas  trois 
pieds,  ce  qui  leur  permet  de  se  réfugier  souvent  dans  les  petites  rivières,  assez  nom- 
breuses, qui  se  jettent  dans  le  golfe  St  Laurent.  Ils  sont  bons  voiliers  et  tiennent  ad- 
mirablement bien  la  mer. 


oftert  par  le  gouvernement  canadien  à  Son  Altesse  Royale  le  Prince  de  Galles  qui  avait 
témoigné  le  désir  d'en  devenir  possesseur  ;  l'au*  édaille  d'argent,  a  été  acquis  par 
im  richo  armateur  anglais,  et  est  employé  à  la  ..  e  long  des  côtes  d'Ecosse  où  ses 
bonnes  qualités  ont  été  et  sont  encore  bien  appréciées. 

Malgré  leurs  bonnes  qualités  nautiques,  malgré  la  hardiesse  et  l'habileté  prover- 
Ijiales  de  ceux  qui  les  montent,  ces  bateaux  sont  cependant  trop  petits  pour  nous  per- 
aneUre  de  donner  à  la  pêche  à  la  morue  toi  t  le  développement  dont  elle  est  susceptible. 
I,."op  souvent  forcés  de  fuir  devant  la  tem^^ête,  d'abandonner,  à  peine  arrivés  sur  les 
ïbH<ls  d:^  pêche,  la  certitude  d'une  prise  abondante  pour  ne  pas  s'exposera  être  pris  au 
large  par  un  coup  de  vent,  dont  ils  no  s'occuperaient  guère  s'ils  montaient  des  bateaux 
pontés,  le3  pêcheurs  de  la  Province  de  Québec  perdent  tous  les  ans  un  temps  précieux 
iandis  q\ie  les  pêcheurs  des  Provinces  Maritimes  recueillent  une  moisson  abondante. 

Les  rapports  des  pêcheries  des  dernières  années  constatent  une  diminution  sensible 
dans  la  quantité  de  ix)isson  prise  par  les  pêcheurs  de  la  Province  de  Québec  ;  or  ce 
déficit,  do  ^a^•is  général,  n'a  pour  cause  que  la  perte  de  temps  occasionné  par  les  tem- 
pêt'^s  fréquentes  qui  ont  sévi  dans  le  golfe. 


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15 


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P 


Le  cadre  restreint  d'une  lecture  ne  me  permet  pas  dera'arrèter  ici  à  une  description 
de  modes  de  pêche  en  usage  au  Canada  et  de  la  manière  dont  on  y  prépare  la  morue 
pour  les  marchés  étrangers.  J'ai  d'ailleurs  donné  ces  détails,  assez  au  long,  dans  un 
travail  que  j'ai  eu  l'honneur  de  lire  à  Londres,  en  188?>,  au  congrès  des  pêcheries,  en 
relation  avec  l'Exposition  Internationale  des  pêches  qui  se  tenait  alors  dans  la  métropole 
commerciale  de  l'Europe. 

Je  ne  puis  cependant  passer  sous  silence  le  fait  que  nous  sommes  encore  dans 
l'enfance  de  l'art  de  pêcher.  Nous  faisons  un  usage  bien  trop  exclusif  de  la  ligne  et  du 
hameçon  et  les  engins  de  pêche  améliorés  semblent  nous  être  antipathiques*,  tant  ils 
s'introduisent  lentement  dans  notre  pays. 

Quoique  nos  rapports  olliciels  constatent  une  augmentation  annuelle  assez,  mar- 
quée dans  la  quantité  de  morue  prise,  si  pourtant,  nous  prenons  en  considération  le 
nombre  toujours  croissant  de  nos  pêcheurs,  nous  pouvons  dire  que  nos  pêcheries 
restent  stationaires.  Et  cet  état  de  chose  n'est  certainement  pas  dû  à  une  diminution 
dans  la  quantité  de  morue  qui  fréquente  les  eaux  canadiennes,  mais  uniquement,  je 
pourrais  dire,  aux  moyens  encore  imparfaits  que  nous  avons  do  faire  la  pêche,  moyens 
(jue  la  routine  semble  avoir  consacré  et  qui  ne  changeront  qu'avec  le  temps. 

Si  nous  exceptons  fiuelques  armateurs,  amis  du  progrès  dans  les  Provinces  Mari- 
times, les  capitalistes  engagés  dans  l'exploitation  des  pêcheries  canadiennes,  sont,  en 
général,  apathiques  et  ne  témoignent  aucun  désir,  ne  prennent  aucune  mesure  pour 
tenir  les  pêcheurs  qu'ils  emploient  au  courant  des  idées  progressives  et  des  améliora- 
tions nombreuses  que  les  autres  pays  apportent,  presque  tous  les  ans,  àleur  système  do 
pêche. 

L'on  est  loin  de  suivre  en  Canada  l'exemple  que  nous  donnent  l'Angleterre,  les 
Etats-Unis,  la  France,  la  Norvège,  etc.,  où  la  science  vient  en  aide  il  l'expérience  pra- 
tique et  contribue  puissamment  au  développement  rapide  de  cette  importante  indus- 
trie. 

Ce  qui  a  le  plus  contribué,  je  crois,  à  paraliser  les  efforts  industrieux  de  bon  nombre 
de  pêcheurs  et  ii  »•  rder  le  développement  de  nos  pêcheries,  est  ce  système  d'avance 
et  de  crédit,  qu'  ?X  au  pêcheur  de  s'endetter,  au  cemmencement  de  chacjue  saison 

de  pêche,  pour  ,  -.<3  somme  ài>eu  près  égale  au  produit  supposé  de  son  travail  pendant 
cette  saison.  Système  vicieux,  souvent  mineux  pour  le  marchand  comme  pour  le 
pêcheur,  inhérent  à  l'exploitation  de  certaines  industries,  inauguré  ici  il  y  a  plus  d'im 
siècle  et  encore  plus  ou  moins  en  vigueur  dans  les  différentes  Provinces  de  la  Confédé- 
ration, connue  d'ailleurs  dans  tous  les  pays  où  se  fait  la  pêche,  et  dont  la  conséquence 
est  d'enlever  toute  énergie,  tout  courage,  tout  esprit  d'initiative  et  d'indépendance  à 
ceux  qui  y  sont  soumis. 

Si  nous  avions  en  Canada,  dans  chacune  des  Provinces  des  bureaux  des  pêcheries 
bieu  organisés,  modèles  sur  les  bureaux  de  commerce  que  possède  chaque  grand  centre, 
et  sous  la  direction  de  savants  et  d'hommes  intelligents  et  pratiques  qui  se  tiendraient 
au  courant  des  inventions  modernes,  travailleraient  à  faire  adopter  ici  les  engins  de 
pêche  améliorés  en  usage  dans  les  autres  pays,  encourageraient  l'esprit  d'entreprise 
chez  les  pêcheurs  etc.,  les  produits  de  notre  pêche  à  la  morue  et  autres  pourraient  être 
indéfiniment  augmentés,  <!ar  nous  pommes  singulièrement  favorisés  par  la  nature  et 
par  une  Providence  bienveillante  qui  out  mis  à  nos  portes  une  source  inépuisable  de 
richesses  maritimes. 

Et  les  capitalistes  qui  engageraient  des  capitaux  dans  l'exploitation  de  nos 
pêcheries,  ont  la  certitude  de  pouvoir  toujours  écouler  facilement  leurs  produits.  La 
morue  sèche  est  considérée  comme  un  article  de  nourriture  indispensable  par  les  habi- 
tants des  pays  chauds  et  les  poissons  saumurés  ont  des  marchés  illimités  en  Europe, 
aux  Etats-Unis,  aux  Antilles  et  même  en  Canada. 

Nous  vendons  chaque  année  aux  pays  catholiques  de  l'Amérique  et  de  l'Europe 
j)0ur  s^":r  m///iorî s  df'^nas/ivs  de  morue  sèchée  et  notre  poisson  saumurée  nous  rapporte 
une  somme  encore  plus  élevée. 

Tandis  que  très  souvent,  aujourd'hui,  l'on  éprouve  beaucoup  de  difficultés  il  placer 


16 

sur  les  marchés  et  à  écouler  les  articles  produite  par  les  manufactures,  la  demande  p|Our 
le  poisson  ne  faiblit  pas.  Et  lorsque  les  voies  ferrées,  maintenant  en  construction, 
couvriront  de  leurs  réseaux  le  Brézil,  l'Espagne  et  autres  contrées  de  la  Méditerrannée, 
de  même  que  le  Canada,  et  permettront  le  transport  facile,  à  l'intérieur  de  ces  pays,  de 
denrées  de  toutes  sortes,  il  n'est  pas  douteux  que  la  demande  pour  nos  poissons  aug- 
mentera encore.  Il  est  donc  évident  qu'un  pays  possédant  des  pêcheries  maritimes 
aussi  importantes  que  les  pêcheries  canadiennes,  trouvera  toujours  dans  leur  exploita- 
tion, une  source  de  prospérité  et  de  richesse  que  ni  les  fluctuations  du  commerce,  ni 
les  caprices  de  la  mode  ne  peuvent  diminuer. 

Nos  principaux  marchés  pour  la  morue  sèche  sont  l'Italie,  l'Espagne,  le  Portugal, 
le  Brézil,  les  Indes  Antilles  et  les  Etats-Unis. 

La  plus  belle  et  la  meilleure  morue  sèche  est  préparée  sur  les  côtes  de  Gaspé,  dans 
la  Province  de  Québec,  où  les  effets  détériorants  des  brouillards  et  des  brumes,  produit 
par  le  Guif  Stream,  se  font  moins  sentir.  Cette  morue  est  bien  connue  et  bien  appré- 
ciée sur  les  marchés  de  l'Espagne,  de  l'Italie,  du  Brézil,  etc.,  où  on  l'expédie  :  la  grande 
en  grenier  dans  des  vaisseaux  à  voile  de  cent  à  trois  cents  tonneaux,  la  petite  dans  des 
barils,  de  forme  particulière,  appelés  toubes,  du  mot  anglais  ttih,  et  contenant  cent 
vingt  huit  livres. 

Pendant  tout  le  temps  que  dure  l'opération  du  séchage  et  que  la  morue  est  exposée 
à  l'action  du  vent  et  du  soleil,  si  la  température  est  favorable  et  le  soleil  brillant,  si 
surtout  les  vents  de  l'ouest  prédominent,  ce  poisson  est  séché  sans  peine  et  la  qualité 
en  est  excellente;  mais  quelquefois  les  vents  de  l'Est,  chargés  de  pluie,  soufflent  pen- 
dant des  semaines  entières  et  alors,  en  dépit  de  tout  le  soin  et  de  toute  l'attention 
possibles,  la  morue  se  gâte,  le  produit  de  plusieurs  jours  d'un  travail  pénible  est  perdu, 


car  ni  les  pêcheurs,  ni  les  armateurs,  ni  les  savants  qui  se  sont  occupés  de  cette  ques- 
tion, n'ont  pu  encore  trouver  les  moyens  d'obvier  aux  effets  destructeurs  de  l'humidité 
et  des  brouillards  sur  le  poisson  longtemps  exposé  à  leur  action. 

Avant  son  expédition  aux  marchés,  la  morue  est  soigneusement  choisie  :  la  meil- 
leure qualité  est  envoyé  en  Europe  et  au  Brésil  et  l'inférieure  aux  Etats-I^nis  et  aux 
Antilles. 

La  Nouvelle-Ecosse,  le  Nouveau-Brunswick  et  l'Ile  du  Prince-Edouard  exportent 
principalement  aux  Etats-Unis,  aux  Antilles  et  au  Brézil.  La  Province  de  Québec 
envoie  sa  morue  marchande  en  Europe  et  au  Brézil,  les  Antilles  acliètent  la  qualité 
inférieure. 

D'après  les  dernières  statistiques  que  nous  avons  sur  ce  sujet  et  qui  nous  sont 
fournies  par  les  rapports  de  la  navigation  et  du  commerce,  les  Antilles  ont  payé  aux 
négociants  canadiens,  en  1883,  deux  millions  de  piastres  pour  morue  sèche,  les  Etats- 
Unis  au  delà  d'un  demi  million,  le  Brézil  et  l'Europe,  chacun  au  delà  d'un  demi  million 
et  la  Guyanne  Anglaise  deux  cent  cinquante  mille  piastres.  D'autres  contrées  ont 
acheté  pour  des  sommes  moindres  mais  encore  assez  rondes. 


î 


VI 


INDUSTRIES  INHERENTES  A  LA  PECHE  A  LA  ISIORUE. 

La  morue  est  le  plus  profitable  de  tous  les  poissons  :  aucune  de  ses  parties  qui  no 
8oit  utilisée.  Le  corps  est  séché  pour  l'exportation,  la  tête,  la  langue  et  la  nove  sont  de 
très  bons  articles  de  nourrituie  ;  l'on  tire  du  foie  une  huile  employée  pour  lubrifier  les 
machines,  pour  la  préparation  des  cuirs,  etc  ,  etc.,  et  dont  les  propriétés  médecinales 
sont  inappréciables  ;  les  os  et  les  entrailles,  soumis  à  certains  procédés  chimiques,  sont 
transformés  en  un  engrais  égal  comme  fertilisant  au  célèbre  guano  péruvien  ;  les  œufs 
salés  sont  un  appât  très  apprécié  pour  les  pêches  à  la  sardine  et  à  l'ancîiois  et  de  la 
vessie  natatoire  séchée,  l'on  obtient  une  excellente  colle. 

L'Angleterre  et  les  Etats-Unis  ont  acheté  du  Canada,  en  1883,  de  l'huile  de  morue 
pour  un  montant  de  cent  ciquante  mille  piastres  et  des  langues  et  noues  saumurées 


rr 


n 


pv'>ur  cent  vingt-cinq  mille  piastres-  Les  fabriques  de  guano  de  la  Nouvelle-Ecosse, 
du  Nouveau-Brunswick  et  de  la  Colombie  Anglaise  ont  mis  sur  les  marchés  dea  pro- 
<luits  estimés  à  cent  mille  piastres. 

J'ai  le  regret  de  constater  ici  que  la  province  de  Québec  ne  possède  pas  encore 
une  seule  manufacture  de  guano.  Des  milliers  de  tonnes  de  débris  de  poisson,  qui 
pourraient  produire  du  guano  pour  une  valeur  d'au  moins  trente  à  trente-cinq  mille 
piastres,  sont  jetées  tous  les  ans  à  la  mer  et  complètement  perdues  ;  tandis  que  si  des 
iaV)riques  étaient  établies  sur  les  côtes  du  Labrador  et  de  la  Gaspésie,  les  fabriquants 
y  trouveraient  de  beaux  profits  et  les  pêcheurs,  sans  trouble,  sans  frais,  sans  augmen- 
tation de  travail,  pour  ainsi  dire,  pourraient  disposer  de  produits  jusqu'ici  complète- 
snent  perdus  pour  eux. 

Ce  que  je  viens  de  dire  des  débris  de  poissons  peut  également  s'appliquer  aux 
ro<:nes  de  morue  qui  ne  figurent  pas  dans  le  chiff're  de  nos  exportations.  Et  pourtant, 
«ions  jiourrions  avantageusement  disposer  de  ce  produit. 

En  France  et  en  Espagne,  où  se  font  les  pêches  à  la  sardine  et  à  l'anchois,  l'on  a 
beisoin  comme  appât,  jjour  ces  pêches,  d'au  moins  cinquante  mille  barils  de  rognes  de 
inorue  tous  les  ans. 

Dans  des  meilleures  années  de  pèche,  la  Norvège  envoie  sur  les  marchés  français 
ot  espagnols  trente-cinq  mille  barils  de  ce  produit  :  c'est  la  plus  grande  quantité  que  ce 
pays  puisse  fournir,  et  pendant  les  années  1881, 1882  et  1883,  les  pêcheurs  norvégiens 
n'ont  pu  exporter  que  vingt-cinq  mille  barils.  Il  reste  donc  un  déficit  de  lingt  mille 
barils  qu'il  serait  très  facile  aux  pêcheurs  canadiens  de  fournir,  car  ils  jettent  des 
milliers  de  barils  de  rognes  tous  les  ans. 

Lorsque  les  rognes  leur  font  défaut,  les  pêcheurs  à  la  sardine  sont  obligés,  pour  les 
îomplacer  d'avoir  recours  aux  expédients  et  à  des  compositions  chimiques  très  coû- 
teuses. 

Observons  qu'un  baril  de  rognes  de  morue  bien  préparé,  vaut  en  moyenne  cin- 
■quante  francs  ($10.00)  sur  le  marché  français.  Multipliant  vingt  mille  barils  parce 
chifi're  de  dix  piastres  nous  avons  une  somme  de  deux  cent  mille  piastres,  jetées  à  la  mer 
tous  les  ans  par  nos  pêcheurs,  parce  que  chez  nous,  aucun  négociant  ne  s'occupe  sérieu- 
sement de  ce  commerce. 

Il  y  a  quelques  années  des  vaisseaux  français  parcouraient  nos  places  de  pêche, 
achetant  toutes  les  rognes  qu'ils  pouvaient  se  procurer  ;  mais  le  déraut  d'expérience, 
chez  nos  pêcheurs,  dans  la  salaison  de  ce  produit,  et  surtout  l'absence  d'une  loi  le  sou- 
mettant à  l'inspection,  avant  qu'il  iutpaqué  pour  l'exportation,  ont  été  cause  qu'un 
article  de  qualité  inférieure  a  été  fourni  et  a  fait  cesser  ce  commerce  qui  promettait  de 
beaux  bénéfices. 

Nos  pêcheurs  pourraient  aussi  faire  grandir  et  prospérer  des  fabriques  de  cor- 
■«lagee,  filets,  hameçons,  lignes,  etc.,  et  des  établissements  de  tonnellerie.  Jusqu'à  pré- 
sent, notre  pays,  jeune  encore,  est  allé  acheter  des  îabriquants  de  la  mère-patrie  et  de 
'a  république  vosine  tous  les  agrès  de  pêche  dont  nos  pêcheurs  font  usage;  mais  le 
besoin  de  manufactures  de  ce  genre  se  fait  maintenant  sentir  au  Canada.  Nos  pêche- 
ries sont  assez  étendues,  notre  commerce  de  poisson  assez  considérable  pour  faire  pros- 
pérer ces  industries  chez  nous,  si  nous  leur  donnions  le  million  de  piastres  que  nous 
distribuons  chaque  année  parmi  les  marchands  étrangers. 

Ajoutons  aussi,  ce  qui  n'est  pas  d'une  moindre  considération,  que  l'établissement 
de  fabriques  d'agrès  de  pêche  sur  nos  côtes  fournirait  de  l'ouvrage  à  des  milliers  de 
bras  et  retiendrait  au  pays  grand  nombre  de  nos  concitoyens. 


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18 

VII 
PÊCHE  AU  HARENG. 

Nous  trouvons  dans  le  dernier  rapport  du  Ministre  de  la  Marine  et  des  Pêcheries, 
f|ue  la  pèche  au  hareng,  qui  occupe  le  second  rang  parmi  les  pêches  maritimes  du 
Canada,  a  produit,  en  188.",  deux  millions  et  un  quart  de  piastres.  Cotte  somme  ne 
comprend  pas  les  quantités  prises  -potxr  la  consommation  locale,  employées  comme 
uppàt  pour  la  pêclie  à  la  morue,  et  churroyées  sur  les  terres,  comme  engrais,  dans  plu- 
sieurs endroits  de  la  Confédération. 

Le  chiffre  est  rond,  le  résultat  paraît  beau,  mais  ils  ne  sont  certainement  pas  en 
rapport  avec  l'abondance  do  ce  poisson  dans  les  eaux  canadiennes.  L'on  ne  donne 
pas  ici  jl  cette  pêche  toute  l'attention  qu'elle  mérite.  Jo  dirai  même,  qu'il  n'y  a,  à 
proj^rement  parler,  pas  de  pêche  au  luireng  régulière  au  Canada- 

Plusieurs  armateurs  de  la  Nouvelle-Ecosse,  du  Nouveau-Erunswick  et  de  l'Ile  du 
Prince-Edouard  équipi^ent  des  goélettes  spécialement  pour  cette  pêcl.e  qu'ils  font  d'une 
manière  très  intelligente  ;  bon  nombre  de  pêcheurs  do  ces  trois  provinces  s'en  occupent 
également  ;  mais  ces  tentatives,  toutes  louables  qu'elles  soient,  no  sont  que  des  entre- 
I)rises  isolées. 

Je  surprendrai  probablement  plusieurs  de  mes  lecteurs,  en  constatant  que  de 
toute  la  Province  do  Québec,  (lui  compte  six  mille  pêcheurs  et  i)ossède  onze  cents 
milles  de  côtes  maritimes  et  des  baies  nombreuses  renommées  par  l'abondance  du 
hareng  qui  s'y  presse,  il  n'est  pas  exporté  deux  mille  barils  de  ce  poisson  annuellement. 

Les  pêcheurs  québecquois  pourraient  retirer  d'immenses  avantages  de  l'exploita- 
tion de  cette  industrie,  mais  ils  se  contentent  d'en  prendre  ce  qu'il  leur  faut  pour 
les  besoins  de  la  pêche  à  la  morue  et  pour  la  consommation  dans  leurs  familles. 

L'on  trouve  la  raison  de  cette  apathie  dans  le  fait  que  les  négociants  de  cette 
Province  qui  s'occupent  de  pêche,  donnent  tout  leur  temps  et  toute  leur  attention  à  la 
pêche  à  la  morue  et  à  la  préparation  de  ses  produits. 

Pourtant,  tous  les  printemps,  à  la  saison  du  frai,  une  quantité  énorme  de  harengs 
se  presse  sur  les  côtes  de  la  Province  de  Québec,  leurs  masses  compactes  couvrent  des 
milliers  d'arpents  de  la  mer,  et  si  nos  pêcheurs  étaient  pourvus  des  appareils  néces- 
saires, si  surtout  ils  avaient  l'espoir  ou  la  perspective  de  disposer  du  produit  de  leur 
travail,  ils  pourraient  facilement,  en  quelques  jours,  réaliser  des  milliers  de  piastres. 

Le  long  du  littoral  du  Golfe  St.  Laurent,  du  Cap-Chatte  à  la  Pointe-au-Maquereau, 
dans  la  Baie  des  Chaleurs,  et  surtout  dans  les  baies  magnifiques  formées  par  le  groupe 
des  Iles  de  la  Madeleine,  les  bancs  de  harengs  sont  si  épais  chaque  printemps,  que  la 
pression  qu'ils  exercent  les  uns  sur  les  autres,  pression  augmentée  encore  par  la  force 
du  courant  les  tuent  par  milliers. 

"  Il  est  absolument  impossible,  sans  en  être  témoin,"  nous  dit  le  Dr.  P.  Fortin,  "de 
se  faire  une  juste  idée  de  la  prodigieuse  abondance  d'oeufs  de  hareng  déposés  tout  le 
long  des  côtes  où  ce  pois^son  va  frayer.  J'ai  vu  maintes  fois  plusieurs  milles  continus  du 
rivage  couverts  de  ces  œufs  sur  une  épaisseur  de  deux  et  trois  pieds." 

Sur  la  somme  de  deux  millions  et  un  quart,  chiffre  de  nos  exportations  de  hareng, 
la  Nouvelle-Ecosse,  le  Nouveau-Brunswick  et  l'Ile  du  Prince-Edouard,  comptent  au 
delà  d'un  millions  et  trois  quarts,  Ontario  cent  mille  piastres  et  la  Colombie  Anglaise 
vingt-cinq  mille  piastres  ;  laissant  ù  la  Province  de  Québec  une  proportion  ridicule 
comparée  à  l'étendue  de  ses  côtes  maritimes. 

L'Angleterre  emploie  à  la  pêche  du  hareng  une  véritable  flotte  de  vaisseaux 
variant  de  cinquante  à  cent  tonneaux.  Elle  engage  dans  cette  industrie  des  capitaux 
énormes  et  une  population  do  (piatre-vingt  mille  hommes.  Ses  pêcheurs,  munis  de 
bons  engins  de  pêche  et  montés  sur  de  bons  bateaux,  vont  à  la  recherche  du  hareng, 
jusque  dans  la  mer  du  Nord. 


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^■ 


V 


10 


: 


La  Norvège,  la  France,  l'Irlande,  l'Ecosse,  les  Etats-Unis  font  cette  ixîche  sur  une 
grande  échelle  et  la  Hollande  lui  doit  sa  richesse. 

Dans  tous  ces  pays,  un  bateau  muni  de  tous  les  engins  nécessaires  pour  la  pèche 
au  hareng,  coûte  jusqu'à  cinq  et  sept  mille  piastres.  11  faiit  que  les  produits  de  cette 
pèche,  convenablement  faite  soient  donc  bien  abondants  puis(iu'ils  sutlisent  non  seule- 
ment à  couvrir  tous  ces  frais  d'exploitation,  mais  encore  rapportent  des  profits  consi- 
dérables aux  exploitateurs. 

Et  cei^endaiit  les  pêcheries  au  hareng  en  Europe,  no  valent  pas  mieux,  ne  sont  pas 
même  aussi  productives  que  les  nôtres.  Les  américains  viennent  à  grands  frais  cueillir 
dans  nos  eaux  une  moisson  abondante,  tandis  que  sans  nous  déranger  beaucoup,  avec 
bien  inoins  de  dépenses,  nous  pourrions  faini  ce  (ju'ils  font. 

Je  ne  crains  donc  pas  d'avancer  que  si  des  capitalistes  canadiens  ou  étrangers 
exploitaient  cette  industrie  sur  une  échelle  en  rapport  avec  son  importance  et  avec 
l'abondance  de  la  matière  première  que  les  eaux  canadiennes  fournissent;  si  des 
l'ompagniesse  formaient,  pourvoyant  nos  pêcheurs  de  bâteai.x  et  d'ai)pareils  de  pêche 
améliorés  tels  que  ceux  en  usage  en  Europe,  je  n'hésite  pas,  dis-je,  à  avancer  que  la 
pèche  au  hareng  en  Canada,  au  lieu  de  deux  millions,  en  rapporterait  six  ou  huit  tous 
les  ans. 

Et  les  marchés  pour  ce  poisson  <iui  est  à  la  portée  de  toutes  les  bourses,  (|ui  est 
surtout  la  nourriture  du  pauvre,  ne  manquent  ])as.  Outre  nos  villes  principales,  Mani- 
toba,  l'Ouest,  le^i  besoins  de  notre  commerce  intérieur  entin,  nous  avons  les  Etats-Unis, 
l'Angleterre,  l'Allemagne,  les  Antilles,  etc.,  (jui  offrent  des  marchés  illimités  pour  toutes 
sortes  de  poissons  saumurés. 

La  population  Euroi)éenne  et  celle  du  Sud  do  l'Amérique  augmente  rppidement, 
et  les  produits  de  pêcheries  dans  ces  pays  sont  loin  d'être  assez  abondante  pour  suf- 
fire à  la  consommation  et  à  la  demande.  Des  spéculateurs  y  trouveront^  donc  toujours 
un  débouché  excellent  pour  leurs  poissons  salés,  pourvu  qu'ils  soient  préparés  avec 
soin  et  caques  dans  les  barils  solides  et  étanches. 

Aussitôt  que  les  glaces  ont  laissé  nos  rivages  le  printemps,  le  hareng  fait  son 
apparition.  Du  mois  d'avril  au  mois  de  décembre,  on  le  rencontre,  en  bancs  im- 
inences  et  serrés,  partout  dans  le  Golfe  St.  Laurent,  le  long  des  côtes  Atlantiques  de  la 
Xouvelle-Ecosse  dans  le  Détroit  de  Canso,  etc.  Même  dans  les  mois  d'hiver  il  reste 
chez  nous,  et  une  quantité  considérable  en  est  prise  en  janvier,  février  et  mars  par 
les  pêcheurs  de  la  côte  Sud  du  Nouveau-Brunswick. 

Le  hareng  du  printemps  n'est  pas  d'aussi  bonne  qualité,  n'a  pas  autant  de  saveur 
que  celui  qui  est  capturé  du  mois  d'août  au  mois  de  décembre.  Le  premier,  dont  la 
préparation  exige  peu  de  frais,  est  caqué  rond  dans  les  barils  de  deux  cents  livres  et 
ainsi  expédié  aux  Etats-Unis  et  aux  Antilles  ;  tandis  que  le  second,  pris  à  la  fin  de 
saison  de  pêche,  étant  plus  gras  demande  plus  d'attention  et  de  soins  dans  sa  salaison. 
Soigneusement  vidé  et  mis  en  rangs,  divisés  chacun  par  une  couche  de  sel,  dans  des 
barils  solides  et  bien  faits  on  l'expédie  en  Europe  et  aux  Etats-Unis  et  dans  les  prin- 
cipaux centres  de  la  Confédération. 

Notre  meilleur  hareng  est  celui  du  Labrador  bien  connu  sur  les  marchés  du 
monde  entier. 

Dans  les  Provinces  maritimes,  depuis  quelques  années,  l'on  prépare  en  boîtes, 
comme  la  sardine  un  petit  hareng  ressemblant  au  produit  français  tant  par  le  goût 
que  par  la  forme.    Ce  nouveau  commerce  réussit  bien  et  progresse  rapidement. 

Une  autre  espèce  de  hareng,  aussi  bien  connu  des  gourmets  d'Europe  que  de  ceux 
•d'amérique,  est  le  célèbre  "  Digby  Chickhn,"  petit  hareng  fumé,  aux  couleurs  brillantes 
et  dorées,  dont  grand  nombre  font  leurs  délices  au  repas  du  matin  et  qui  est  pris  et 
préparé  à  Digby  dans  la  Nouvelle-Ecosse  Cent  soixante-et-dix  mille  boîtes  de  ce 
poisson  ont  été  expédiées  aux  Etats-Unis  et  en  Europe  en  1883. 

Les  pêcheurs  canadiens  ont  fourni  aux  marchés  étrangers  l'année  dernière  : 

500,000  barils  de  hareng  saumuré.  1,000,000  boites  de  hareng  fumé.  17,000,000 
livres  de  hareng  frais. 


20 

Tout  le  hareng  frais  et  fumé  compris  dans  l'état  ci-dessus  est  expédié  de  la 
Nouvelle-Ecosse,  du  Nouveau-Brnswick  et  de  l'Ile  du  Prince- Edouard,  aux  Etats-Unis. 
La  plus  grande  partie  du  même  poisson,  saumuré,  part  aussi  des  mêmes  Provinces 
pour  les  marchés  anglais,  américains  et  des  Antilles. 

Mais,  je  le  répète,  nos  exportations  de  hareng  pourraient  être  doubles,  triples  et 
quadruples,  si  nous  pouvions  donner  à  cette  pêche  toute  l'attenton  que  mérite  son 
importance- 

Espérons  dans  un  avenir  prochain,  que  quelques-uns  des  capitalistes  canadiens, 
ou,  à  leur  défaut,  des  spéculateurs  étangers,  viendront  développer  puissamment  cette 
industrie,  que  seul  le  manque  de^moyens  suffisants  à  jusqu'ici  empêcher  d'être  plus 
productive- 

VIII. 
PECHE  AU  MAQUEREAU. 


" 


Longtemps,  trop  longtemps,  nos  énergiques  et  entreprenante  voisins  des  Etats- 
Unis  ont  eu  le  monopole  exclusif  de  la  pêche  au  mafjuereau  dans  les  eaux  canadiennes. 
Je  suis  heureux  de  pouvoir  dire  :  ce  monopole  est  disparu,  pour  toujours,  il  faut  l'es- 
pérer, et  tout  porte  à  le  croire. 

Fatigués  d'assister  aux  succès  toujours  croissants  des  pêcheurs  deGloucester  qui, 
chaque  année,  venaient  à  leurs  portes,  receuillir  une  moisson  abondante,  les  pêcheurs 
de  la  Nouvelle-Ecosse  et  du  Nouveau-Brunswick  se  sont  mis  à  l'œuvre.  Aujourd'liui 
ils  font  eux-mêmes  cette  pêche  sur  une  grande  échelle  et  en  retirent  de  beaux  profits. 
Ils  peuvent  avec  orgueil  montrer  une  belle  flotte  de  fines  goélettes  qui,  par  la  symétrie 
de  leurs  lignes  et  leurs  qualités  nautiques,  soutiennent  avantageusement  la  comparai- 
son avec  les  goélettes  américaines  réputées  les  meilleures  du  monde  entier.  Non  seu- 
lement possèdent-ils  ces  goélettes  équippées  avec  lo  plus  grand  soin,  mais  ils  ont 
aussi  adopté  les  engins  de  pèche  les  plus  modernes  et  les  plus  améliorés,  et  ils  ex- 
ploitent cette  industrie  avec  tout  le  tact  et  toute  l'intelligence  nécessaire  au  succès 
d'une  entreprise  quoiqu'elle  soit,  mais  surtout  indispensables  pour  la  pèche  au  maque- 
reau. Cette  pêche,  en  effet,  est  difficile,  précaire  et  incertaine.  De  deux  goélettes, 
parties  ensembles  du  même  port  d'armement,  l'une  peut  sillonner  le  golfe  St.  Laurent 
en  tous  sens  pendant  plusieurs  jours  sans  rencontrer  un  seul  banc  de  poisson,  tandis 
que  l'autre  complétera  sa  cargaison  dans  une  quinzaine  et  quelques  fois  on  moins  de 
temps  encore.  Elle  demande  donc,  de  la  sagacité,  une  vigilance  de  tous  les  instants 
et  une  persévérance  à  toute  épreuve— qualités  qui  distinguent  nos  pêcheurs  des  pro- 
vinces maritimes,  mais  aussi  faite  avec  ces  conditions,  elle  est  généralement  heureuse, 
donne  de  gros  profits  et  est  certainement  digne  de  l'attention  sérieuse  de  nos  popula- 
tions maritimes  et  des  capitalistes  de  tous  les  pays, 

Il  est  à  espérer  que  la  Province  de  Québec,  qui  jusqu'à  ce  jour  n'a  donné  que  peu 
ou  point  d'attention  à  cette  pêche  aura  aussi  bientôt  sa  flotte  de  goélettes  à  maquereau. 

Grand  nombre  d'amateurs  et  de  pêcheurs  américains,  en  venant  exploiter  cette 
industrie  chez  nous,  ont  acquis,  les  uns  de  grandes  fortunes,  les  autres  une  honnête 
aisance  :  Nos  concitoyens  des  Provinces  maritimes  imitant  cet  exemple,  y  trouve 
une  source  précieuse  de  bons  revenus.  Québec  ne  pourrait-il  faire  la  même  chose  ? 
Les  hommes  d'aftairts  sont-ils  moins  intelligents,  les  pêcheurs  moins  habiles  et  moins 
hardie  ? 

Ceux  qui,  à  l'époque  de  la  canicule,  fuient  les  chaleurs  et  l'abmosphère  vicié  des 
villes  pour  venir  respirer  à  pleins  poumons  l'air  pur  et  vivifiant  du  golfe  St.  Laurent, 
et  qui,  généralement,  prennent  passage  à  bord  du  "  Miramichi.  "  ou  autre  steamer 
de  la  populaire  "  Compagnie  des  ports  du  Golfe,"  ont  souvent  rencontré  dans  leurs 
visites  aux  Provinces  maritimes,  ces  jolies  goélettes  de  la  Nouvelle-Ecosse  et  de  l'Ile 
du  Prince-Edouard,  et  les  ont  aussi  souvent  prises  pour  autant  de  bateaux  ^  >  plaisir 
croissant  dans  le  golfe,  tant  elles  luttent  entre  elles  de  propreté  et  d'élégance,  tant  elles. 


^ 


ri 


21 


^ 


paraissent  coquettes  avec  leurs  mats  élancés  et  leurs  grandes  voiles  blanches.  "  Mai» 
nous  dit  le  Dr.  Fortin,  si  vous  les  approchez,  vous  reconnaissez  bien  vite  votre  erreur  ; 
car  sur  le  pont  de  chacune  d'elles,  vous  pouvez  voir  dix,  quinze  on  vingt  hommes  acti- 
vement occupés  les  uns  à  prendre  du  maquereau,  les  autres  à  saler  et  ca(]Uor  le  poison 
déjà  capturé  ou  à  réparer  les  filets  et  autres  engins  de  pêche.  Ce  qui  frappe  surtout  le 
visiteur,  c'est  l'ordre  admirable  qui  règne  à  bord  do  ces  bateaux-pôcheurs,  nonobstant 
»ine  leur  cales  soient  remplies  de  iwisson  et  leurs  ponts  encombrés  de  barils,  filets,  sac» 
de  sel,  lignes,  etc. 

Les  "gcëlettes  à  maquereau"  ont  ordinairement  une  capacité  de  GO  à  100  ton- 
neaux et  sont  montées  par  dix  à  quinze  hommes  péchant  "  à  la  part."  Elles  ont  peu 
de  profondeur,  mais,  par  contre,  sont  très  larges  et  très  élancées  à  la  poupe  et  à  la 
proue  ;  ce  qui  leur  donne  un  pont  spacieux  où  i)euvent  se  faire  facilement  les  opéra- 
tions du  caquage  et  de  la  salaison.  Les  grandes  voiles  en  coton  (]ui  les  couvrent,  leur 
permettent  de  profiter  de  la  moindre  petite  brise  lorsqu'elles  sont  à  la  recherche  de 
bancs  de  poisson. 

Pour  la  pêche  au  maquereau  dans  le  golfe,  l'on  se  sert  de  la  ligne  et  du  hameçon, 
du  filet  traînant  et  de  la  seine-bourse.  Le  filet  fixe,  la  seine  ordinaire  de  grandeur» 
différentes,  les  trappes,  nasses,  etc.,  sont  en  usage  le  long  des  côtes,  dans  les  anses, 
havres  et  baies  où  se  fait  cette  pèche. 

La  pêche  au  hameçon  suppose  de  l'appât  :  avant  de  quitter  leur  port  d'armement, 
les  pêcheurs  se  pourvoient  de  plusieurs  barils  d'un  petit  i)oisson,  très  gras,  appelé  en 
anglais  "  poggie."  Ce  poisson,  Imché  menu  par  un  instrument  ressemblant  assez  à  une 
machine  à  couper  les  légumes,  sert  à  attirer  le  mu(iueroau  il  la  surface  de  la  mer  et 
à  amorcer  les  hameçons. 

Les  filets  traînants,  variant  en  dimensions  de  vingt  à  trente  brasses  do  longueur 
et  de  quatre  à  six  de  profondeur,  s'attachent  au  nombre  de  trente,  quarante,  cinquante, 
etc.,  à  l'arrière  ou  à  l'avant— suivant  les  circonstances — d'un  bateau  qu'on  laisse  aller 
à  la  dérive. 

Avec  la  seine-bourse,  l'on  entoure  rapidement  les  bancs  do  maquereau  que  la  dif- 
fusion du  "  poggie"  a  attiré  à  la  surface  de  la  mer,  et  lorsque  le  filet  est  jeté,  on  plisse 
la  partie  inférieure,  en  forme  de  bourse,  au  moyen  d'un  système  ingénieux  de  <'or- 
dages,  anneaux  et  poulies.  Le  filet  ainsi  plissé  tient  enfermé  le  maquereau  que  l'on 
prend  à  loisir  et  à  mesure  (lue  les  hommes  de  l'équipage  salent  et  encaquent. 

Le  filet  fixe  est  attaché  le  soir  à  l'entrée  d'un  havre  ou  d'une  baie  où  le  maque- 
reau abonde,  et  le  matin  suivant  le  pêcheur  va  prendre  le  poisson  qui  s'est  maillé 
pendant  la  nuit. 

La  seine  ordinaire  dont  les  dimensions  varient  de  cimiuante  à  deux  cent  cin- 
quante brasses  de  longueur  sert  à  entourer  les  bancs  de  poisson  qui  approchent  du 
rivage.  Un  des  bouts  de  la  seine  est  confié  à  un  certain  nombre  d'hommes  sur  le 
rivage  et  le  bateau  contenant  le  filet  fait  aussi  rapidement  que  possible  le  tour  du 
banc  de  poisson.  Cette  opération  terminée,  les  hommes  du  bateau  sautent  à  terre 
avec  l'autre  bout  de  la  seine  et  l'on  tire  le  filet  aussi  près  que  possible  de  la  rive.  Sui- 
vant la  grandeur  de  la  Beine  dont  on  fait  usage,  quatre  cent,  mille,  deux  mille  barils 
de  maquereaux  sont  capturés  d'un  seul  coup  de  fi'et. 

Les  trappes,  nasses,  etc.,  varient  de  formes  presqu'à  l'infini,  suivant  les  besoins  du 
moment,  les  circonstances  des  lieux  et  l'esprit  plus  ou  moins  inventif  de  celui  qui  en 
fait  usage. 

De  tous  les  poissons  qui  fréquentent  les  eaux  canadiennes,  le  maquereau  est  un 
des  plus  appréciés.  On  le  rencontre  au  large  des  côtes  de  la  Nouvelle-Ecosse,  dans  la 
Baie  de  Fundy,  dans  le  Détroit  de  Canso,  mais  nulle  part  plus  abondant  que  dans  le 
golfe  St-Laurent,  surtout  autour  de  l'île  du  Prince-Edouard,  dans  la  Baie  des  Chaleurs 
et  aux  îles  de  la  Madeleine. 


Les  produits  de  notre  pêche  au  maquereau  sont  encaqués  en  saumure  pour  la  plus 

ide  partie.    L'on  en  exporte  aussi  à  l'état  frais  ou  conservés  en  boîtes  de  la  même 

le  homard.    Nos  meilleurs  marchés  sont  les  Etats-Unis,  quoique  la 


grandi 
manière  que 


22 

<jrrande-Brctagne  et  les  Antilles  nous  en  achètent  aussi  une  certaine  quantité.  La 
vente  de  ce  poisson  a  rapporté,  en  188;),  un  million  deux  cent  cinquante  mille  piastres, 
mais  cette  somme  pourrait  être  considérablement  augmentée,  car  il  y  a  place  encore 
I)our  un  bon  nombre  d'autres  goélettes  et  pour  des  milliers  de  bras. 


IX 

rÊCHE  AU  HOMARD. 

Encombrer  tout  genre  d'affain^s,  tout  commerce  oui  semblent  devoir  être  rémuné- 
rateurs, telle  est  la  tendance  générale  dans  ce  siècle  de  concurrence.  La  mise  du 
liomard  en  boîtes  n'a  pas  échappé  à  cette  règle. 

"  11  y  a  à  peine  dix  ans,  nous  dit  M.  Hunter  Duvar,  inspecteur  des  pêcheries  de 
l'Ile  du  Prince-Edouard,  dans  son  ra})|K)rt  de  1879,  lors(|ue  nous  pouvions  avoir,  deux 
ou  trois  homards  ])Our  un  sou,  un  homme  vint  du  Nouveau-Brunswick  à  l'Ile  du 
Prince-Edouard  et  y  fonda  une  fabrique  de  conserves  de  homard.  Attirés  par  ses 
succès,  d'autres  personnes  mirent  des  capitaux  dans  cette  industrie  qui  augmenta 
graduellement  jusqu'à  il  y  a  trois  ou  <iuatre  ans,  époque  à  laquelle,  i)renant  un  essor 
plus  rapide  elle  se  développa  en  d'immenses  proportions." 

L'Ile  du  Prince-Edouard  prépara  pour  les  marchés  : 


pl 


En  1871.... 

0,711  boîtes  de 

conserves  de  liomard 

"    1875.... 

151,248 

il 

II 

"    187G.... 

352,()7() 

<( 

II 

"    1877.... 

663,900 

li 

u 

"    1878.... 

1,649,800 

u 

tt 

"    1879.... 

2,272,825 

(f 

« 

"    1880.... 

3,551,000 

II 

« 

"    1881.... 

5,200,000 

n 

(( 

"    1882.... 

6,300,000 

11 

« 

Cette  même  Province  qui  ne  comptait  qu'une  fabrif^ue  en  1871,  en  possédait,  dix 
ans  après,  en  1881,  cent  vingt  en  pleine  opération. 

La  même  progression  ascendante  s'est  manifesté  au  Nouveau-Brunswick  et  à  la 
Nouvelle-Ecosse. 

En  1870,  au  Nouveau-Brunswick,  le  propriétaire  de  la  seule  fabrique  alors  en 
o^jération  en  cette  Province,  mit  sur  le  marché,  environ  vingt  mille  boîtes  de  homard. 
Douze  ans  après,  en  1882,  au  delà  de  six  millions  de  boîtes  partaient  du  Nouvuau- 
Brunswick  pour  les  Etats-Unis  et  l'Europe. 

La  Nouvelle-Ecosse  qui  ne  pouvait  offrir  en  1870  que  trente  mille  boîtes  en  expé- 
diait cinq  millions  en  1883. 

Québec  est  loin  derrière  les  Provinces-Sœurs  dans  l'exploitation  de  la  pêche  au 
homard.    Elle  n'a  livré  au  commerce  que  huit  cent  mille  boîtes  en  1883. 

En  additionnant  les  chiffres  ci-dessus,  nous  trouvons  que  la  pêche  au  homard 
presqu'entièrement  inconnue  au  Canada  en  1870,  fait  aujourd'hui  prospérer  au  delà  de 
six  cents  fabriques  qui,  l'année  dernière,  ont  fourni  à  nos  exportations  un  contingent 
de  dix-huit  millions  de  boîtes,  valant  trois  millions  de  i)iastres  :  presqu'autant  que 
les  produits  de  la  pêche  au  hareng  et  de  la  pêche  au  maquereau  mis  ensemble. 

Ces  dix-huit  millions  de  boîtes,  à  trois  homards  pour  chaque  boîte,  représentent 
cinquante-quatre  millions  de  homards  capturés  dans  les  eaux  canadiennes  en  1883.  Le 
nombre  total  de  ces  crustacés  pris  chaque  année  en  Angleterre  n'est  que  de  trois 
miUions. 

Cette  énorme  progression  dans  la  prise  annuelle,  tout  en  faisant  voir  l'étendue  et 
la  richesse  de  nos  pêcheries  à  homard,  nous  signale  en  même  temps  le  danger  d'une 


! 


23 

production  excessive  :  deux  faits  (lui  démontrent  la  nécessité  d'économiser  à  temm  et 
de  perpétuer  cette  rosourco  que  la  Province  a  mise  a  notre  disposition. 


siiires  pour  prévenir  sur  nos  côtes  toute  pêche  au  liomard  aveugl(!  et  non  raisonnée.'' 

Si  la  pêche  excessive  que  l'on  fait  inainteDunt,  so  continuait  sai.s  ctre  soumise  i\ 
de  sages  règlements,  la  prospérité  des  i)ropriétaires  de  fabriques  et  autres  intéressés, 
grandirait  encore  pendant  quehiue  temps  et  le  pays  semblerait  bénéficier  du  développe- 
ment rapide  de  cette  industrie,  mais  la  réaction  viendrait  nécessairement  et  serait 
d'autant  plus  forte  qie  nous  aurions  été  moins  i)rudent.s. 

Il  me  paraît  presqu'inutile  do  mentionner  que  cette  industrie  tient  mie  place 
importante  dans  l'économie  générale  do  la  Confédération.  Chacun  comprendra  qu& 
l'érection  des  b:ltisses  nécc-saires  à  l'exploitation,  les  ouvrages  en  fer  et  en  ferblanc,  la 
construction  des  bateaux,  la  coupe  du  l)ois  do  cbauHage,  etc.,  etc.,  font  circuler  do 
larges  sommes  d'argent  parmi  notre  population  nuiritime  et  donne  do  l'ouvrage  bien 
payé  à  des  milliers  de  bras,  hommes,  femmes  et  enfants. 

L'Angleterre  est  notre  meilleur  marché  pour  le  homard.  Elle  nous  en  achète  tous 
les  ans  environ  douze  millions  de  boîtes.  La  balance  est  repartie  entre  les  Etats- 
Vnia,  la  France,  l'Allemagne,  le  Brézil,  les  Antilles  et  quelcjnes  autres  contrées  do 
l'Amérique  du  Sud. 

rÈCIIE  AUX  HUITRES. 

Un  mot  de  la  pèche  aux  huitrcs  tnjuve  ici  naturellement  sa  i)lace.  Ce  molluS(|ue, 
bien  connu  des  gourmets  de  tous  les  pays,  est  encore  assez  abondant  au  Canada.  Eu 
Europe,  sa  rareté  le  fait  vendre  à  un  prix  presque  fabuleux,  et  les  riches  seuls  peuvent 
se  permettre  de  temps  à  autre  une  bonne  souj^k)  aux  huîtres. 

Nous  avons  ici  la  "  Malpèque,"  la  "  St.  Simon,"  la  "  Caraquet"  et  autres  variétés 
«jui  empruntent  leurs  noms  aux  localités  où  se  trouvent  situés  les  bancs  sur  les(|uels 
on  les  pèche. 

Cette  pèche  se  pratique  surtout  sur  les  côtes  et  dans  les  baies  de  l'Ile  du  Prince- 
Edouard  et  du  Nouveau-Brunswick  et  rapporte  annuellement  une  somme  ronde  de 
deux  cent  mille  piastres. 


PECHE  AU  LOUP-MARIN. 


Les  troiipemix  de  loups-marins  qui  fréquentent  le  golfe  Saint-Laurent  et  l'océan 
Atlantique,  arrivent  ici  dans  le  mois  de  novembre.  Ils  viennent  dans  le  golfe,  princi- 
palement par  le  détroit  de  Belle-Isle.  Us  se  tiennent  près  des  côtes  du  Labrador  et  de 
Terreneuve,  pénétrant  dans  toutes  les  baies,  rasant  la  rive  en  doublant  les  pointes.  Us 
aiment  beaucoup  à  s'étendre  sur  le  sable  du  rivage  ou  sur  les  roches  plates  pour  se 
chaufier  aux  rayons  du  soleil  ;  mais  au  moindre  bruit,  et  surtout  s'il  aperçoivent  les 
pêcheurs,  ils  plongent  et  disparaissent  aussitôt. 

Le  loup-marin  est  d'une  grande  valeur,  non  seulement  à  cause  de  sa  graisse  ([ui 
produit  une  huile  sui)éiieure  à  celle  de  la  baleine,  mais  aussi  pour  la  peau  qui  se  tanno 
facilement  et  fait  un  excellent  cuir. 

Les  premiers  marins  qui  visitèrent  le  golfe  Saint- Laurent,  comprirent  de  suite 
l'importance,  au  point  de  vue  commercial,  de  cette  pêche  qui  commença  aussitôt  après 
la  découverte  du  Canada.    Si  nous  ajoutons  foi  aux  récits  de  maints  voyages  faits  sur 


24 

'a  côie  du  Labrador  penlant  le  siècle  dernier,  un  nombre  immense  de  loups-marins 
furent  alors  tués. 

Dans  ce  temps,  comme  aujourd'hui  encore,  l'on  se  servait  de  fdots  pour  la  capture 
<le  ces  amphibies  Ces  filets  sont  en  cordes  de  chanvre,  très  fortes  quoiciue  fines. 
J^urs  mailles  mesurent  huit  pouces  carrés  et  laissent  entrer  la  tête  de  l'animal.  Quel- 
ques-uns ont  au  delà  de  six  cents  pieds  de  longueur  su»-  une  profondeur  de  soixante 
pieds. 

Ti'époque  du  passajze  du  loup-marin  près  des  côtes  étant  ^généralement  connu,  les 
filets  sont  tendus  <iuelques  jours  auparavant.  Un  des  pêcheurs  est  placé  comme  sen- 
tinelle sur  un  rocher  avancé  et  donne  avis  de  l'approche  des  troupearix.  Aussitôt  qu'ils 
sont  entrés  en  dedans  de  la  ligne  des  filets,  le  signal  est  donné  et  les  pêcheurs  se 
hâtent  de  lever,  à  l'aide  d'un  fort  cabestan,  un  filet  retenu  au  fond  de  l'eau,  à  l'entrée  de 
la  pêche,  par  des  poids  on  plomb.  Ce  filet  ferme  l'ouverture  par  laquelle  les  loups- 
îuarins  sont  entrés  dans  l'enclos  et  les  emprisonnent.  Alors  les  pêcheurs  sautent  dans 
leurs  bateaux,  frappent  l'eau  de  leurs  avirons  et  effraient  par  tous  les  moj'ens  possibles 
ces  animaux  qui,  cherchant  une  issue  pour  s'enfuir,  plongent  et  se  prennent  dans  les 
filets  dont  les  mailles  sont  tenues  ouvertes  par  des  câbles  i)lacés  d'une  manière  parti- 
<'ulière  à  leur  partie  supérieure  inférieure. 

Cette  pêche  se  pratiquant  on  novembre  et  en  décembre,  est  très  ardue  en  raison  de 
îa  sévérité  du  climat  en  cette  saison  de  l'année. 

IjOs  loups-marins,  gelés  quelques  minutes  après  avoir  été  retirés  de  la  mer,  sont 
placés  dans  de  grands  hangards  où  ils  demeurent  jusqu'à  ce  que  le  soleil  du  printemps 
3es  ait  assez  amollis  pour  jiermettre  de  les  couper  par  morceaux  et  de  faire  fondre  leur 

graisse. 

L'on  ne  se  borne  pas  à  attendre  l'entrée  des  loups-marins  dans  les  baies  pour  les  y 
prendre  au  moyen  de  filets,  mais  on  va  leur  faire  la  chasse  le  printemps  sur  les  champs 
•de  glace  qui  couvrent  le  golfe  Saint-Laurent  et  le  nord  de  l'océan  Atlantique.  Cette 
dernière  manière  de  les  capturer  est  la  plus  pratiquée  et  aussi  la  plus  productive. 

L'on  équippo  pour  cotte  chasse  des  voiliers  fortement  construits  et  des  bateaux-à- 
vapeur  qui  partent  au  commencement  de  mars  afin  do  rencontrer  ces  amphibies  sur 
les  champs  de  glace,  car  une  fois  qu'ils  ont  pris  la  mer,  il  est  inutile  de  les  poursuivre 
■et  ils  peuvent  défier  les  chasseurs  les  plus  habiles. 

Les  pêcheurs  du  Labrador  et  des  îles  de  la  INIadeleine  sont  les  seuls  qui  en  Ca- 
nada s'occupent  do  cette  pêche  qui  certainement  paierait  de  gros  dividendes  à  ceux 
qui  y  placeraient  des  capitaux. 

Terreneuve  fait  la  chasse  aux  loups  marins  sur  une  grande  échelle.  Elle  y  em- 
ploie dix  mille  hommes.  Les  capitalistes,  bien  connus  j)onr  leur  esprit  d'initiative  et 
d'entreprise,  ont  remplacé  les  voiliers,  autrefois  en  usage,  jiar  une  flotte  de  magni- 
fiques bateaux-à-vaj)our  qui  ont  sur  les  goélettes  l'ax  antage  de  faire  et  de  compléter 
deux  voyages  au  lieu  d'un. 

Malgré  les  dépenses  très  grandes  que  nécessite  l'exploitation  de  cette  industrie, 
les  produits  sont  tellement  rémunérateurs,  que  des  hommes  compétents  et  expéri- 
mentés affirment  ijue  les  capitaux  (|u'on  y  engagent  ne  i>euvent  rapporter  moins  de  26 
p.  c.  mais  le  plus  souvent  donnent  50  et  GO  ]>.  c. 

Chaque  printemps  les  journaux  nous  annoncent  que  les  steamers  de  Terreneuve 
sont  revenus  de  leur  campagne,  les  uns  avec  dix,  quinze  et  vingt  mille  loups  marins, 
les  autres  avec  vingt-cinq,  trente  ot  quarante  mille.  Or  un  louj)  marin,  huile  et  peau, 
vaut  en  moyenne  trois  piastres. 

En  1883  les  pêcheurs  de  Terreneuve  ont  tué  quatre  cent  mille  de  ces  animaux  ; 
valeur  :  un  million  cent  vingt  mille  piastres.  Les  pêcheurs  canadiens  n'en  ont  tué 
que  soixante-et-quinzo  mille  ot  j)ourtant  cette  chasse  serait  aussi  productive  ici  qu'à 
Terreneuve  si  nos  hommes  d'affaires  voulaient  s'en  occuper. 


25 


XI 

PÊCHERIES  INTÉRIEURES. 

PAoïB  AU  Saumon. 

Moindres  en  importance,  au  point  de  vue  commercial  que  les  pêches  maritimes» 
les  pêcheries  intérieures  du  Canada  sont  néanmoins  d'une  grande  valeur  au  point  de- 
vue  économique. 

Faisant  abstraction  des  trois  millions  do  piastres  qu'elles  aioutent  annuellement 
au  chiffre  de  nos  exportations,  elles  sont  une  source  presqu'inepuisable,  où  ceux  qui 
habitent  les  rives  de  nos  grands  lacs  et  de  nos  princii)ales  rivières  vont  cliorcher  parti© 
de  leur  nourriture  quotidienne  et  le  poisson  nécessaire  à  l'alimentation  de  nos  mar- 
chés de  l'intérieur. 

Pêche  au  saumov.—An  i)reniler  raii<î  parmi  les  poissons  d'oau  douce,  se  tient  le 
saumon,  qui  préparé  à  toutes  les  sauces,  s'étale  sur  l'humble  assiette  du  pauvre  de 
même  que  sur  le  somptueux  couvert  du  riche. 

Nos  rivières,  autrefois  célèbies  par  l'aboudauce  dn  saumon  qu'elles  contenaient, 
commencent  à  s'épuiser  par  suite  d'une  pèche  non  raisonnée  et  du  défaut  de  lois  i)ro- 
tégeant  ce  poisson  dans  les  premières  années  de  la  découverte  de  ce  paj'S. 

L'on  serait  ixiut-être  porté  ù  se  demander  comment  il  se  fait  (jne  maintenant, 
{)endant  la  dernière  décade,  i»ar  exemple,  en  dépit  des  sages  règlements  limitant  la 
durée  delà  pèc-he  au  saumon,  prescrivant  la  diniension,  le  nombre  et  le  genre  des 
filets  dont  on  se  servira  i»our  la  capture  de  ce  poisson  ;  en  dé{)it  des  efforts  tentés 
par  le  gouvernement  pour  ramener  ral)omlance  dans  nos  rivières;  ciu(ji(iue  nous  dé- 
pensions, tous  les  ans,  des  milliers  de  piastres  j>our  aiiler  à  la  propugatiou  naturelle  du 
saumon  parla  pis(Mculture  ;  en  présence  du  fait  i|ue  des  millions  et  des  millions  de 
jeunes  poissons,  i)artent  c'haque  été  de  trei/o  établissements  de  pisciculture  (pie  nous 
maintenons,  i>onr  être  distril)ués  dans  les  rivières  ;  comment  il  se  fait,  dis-je,  (|u'il  n'y 
a  pas  une  augmentation  mar<iuéedans  la  (luantilé  annuelle  de  saumon  ca[)turé'.' 

Quoique  nos  côtes  et  nos  rivières  soient  aujf)m-d'bui  comparativement  liien  gar- 
dées, quoi(iue  les  ofliciers  notnmés  pour  faire  exécntcM-  nos  lois  d(>  pêche,  fassent  bien, 
très-bien,  leur  devoir,  cependant,  je  suis  humblement  d'opinion  <in"une  protection  plus 
étendue  et  plus  ellicace  encore  est  nécessaire. 

Le  nombre  des  gardiens  pourrait  être  augmenté  et  de  bons  salaires  donnés  à  <*ha- 
cun  d'eux  athi  de  leur  permettre  do  <lonner  tout  leur  temps  aux  devoirs  de  leur  charge. 
Nous  devrions  enfin,  par  tous  les  moyens  possibles,  enq)ècber  l'onivre  destructrice  des 
nombreux  maraudeurs  «pii  tous  les  automnes  se  rendent  dans  nos  meilleures  rivières 
à  saumon  et  tuent  ces  poissons  par  milliers  dans  les  fosses  où  iU  montent  pour  frayer. 

Je  ne  suis  cert(!S  pas  l'ennemi  de  la  pêche  au  saumon  A,  la  mon(;he,  ou  d'aucun 
autre  genre  de  sport.  .le  me  rapjK'.lle  même  avec  beaucoup  de  plasir  les  journées  agré- 
ables, les  heures  délicieuses  que  j'ai  passées  à  faire  cvita  pêche  dans  quehiues-unes  de 
nos  magnifi([U(is  rivières  ;  mais  je  ne  puis  ni'eiii[iêclier  do  penser  et  de  dire  que  la 
saison  pour  la  pêche  au  saumon  à  la  mouche  est,  à  mon  avis,  trop  longue. 

Je  suis  intimement  convaincu  que  si  le  pêcheur  à  la  mouciie  était  obligé  d'empa- 
queter ses  lignes  le  jour  même  où  le  pêcheur  au  filet  est  forcé  par  la  loi  de  laisser 
un  libre  passage  au  saumon,  nous  en  retirerions  de  grands  bénéfices. 

Ceux  pour  (pii  la  pêche  au  saumon  est  un  moyen  de  subsistance  et  t|ui  fournissent 
A  nos  exportations  le  plue  fort  contigent  de  ce  poisson,  sont  obligés,  par  une  loi  varian»; 
avec  les  dittérentes  Provinces,  de  lover  leurs  filets  à  une  époque  donnée  :  à  la  lin  de 
juillet  dans  la  Province  de  Québec,  un  peu  plus  tard  dans  la  Nouvelle-Ecosse  et  le 
Nouveau-Brunswick  ;  tandis  que  l'on  permet  au  pêcheur  à  la  mouche,  <pn  n'a  d'autre 
objet  en  vue  que  son  amusement,  de  pêcheur  jusiprà  la  fin  de  septembre,  même  jus- 
qu'au 15  octobrt\ 


26 


N'y  a-t-il  pas  là  une  anomalie  ?  La  conséquence  d'un  tel  état  de  chosas,  est  que 
le.s  saumons  qui  éoliappaut  aux  lilets,  montent  dans  les  rivières  pour  y  reproduire 
leur  espèce,  tombent  victimes  de  l'abiloté  du  pêcheur  à  la  mouche.  Des  centaines  de 
tiamons  qui  en  produiraient  des  milliers  d'autres  sont  ainsi  détruits.  En  résumé:  qu'un 
nombre  suffisant  de  gardiens  bien  payés  soient  nommés  pour  protéger  nos  rivières 
contre  les  dépradations  périodiques  des  êmmeurs  ;  que  la  saison  pour  la  pêche  à  la 
mouche  soit  la  môme  (lue  celle  pour  le  pêche  aux  filets  ;  que  l'on  redouble  de  vigilance 
et  d'énergie  pour  faire  exécuter  les  lois  et  les  règlements  prohibitifs  et  nous  ne  serons 
peut-être  pas  obligés  d'encourir  des  dépenses  élevées,  tous  les  ans  pour  la  reproduc- 
tion artificielle,  dont  les  résultats  pratiques  ne  sont  pas  encore  bien  prouvés. 

De  ce  que  je  viens  de  dire,  il  ne  faudrait  pas  conclure  néanmoins  que  nos  pêcheries 
à  saumon  sont  épuisées.    Loin  de  là. 

Comparées  à  ce  qu'elles  étaient  il  y  a  un  demi  siècle,  leur  abondance  a  diminué, 
mais  elles  conservent  une  importance  considérable,  ainsi  que  je  le  prouverai  bientôt 
par  des  clnff"res. 

Elles  sont  encore  une  source  de  bien  être,  môme  de  richesse,  pour  une  bonne  partie 
de  notre  population  maritime  et  grand  mombre  de  riches  gentils-hommes,  tant  d'Eu- 
rope que  d'Américjue,  viennent  cliaque  année,  pendant  la  belle  saison,  y  goûter  les 
plaisirs  du  sport. 

Les  Etats-Unis  achètent  prestjue  tout  notre  saumon  frais  et  saumuré-  Celui  con- 
servé en  boîte  (tins)  est  expédié  sur  les  marchés  anglais.    , 

L'on  a  déjà  essayé,  avec  succès,  le  commerce  du  saumon  frais  entre  le  Canada  et 
l'Europe  et  il  n'est  pas  douteux  (jue  la  qualité  exportée  en  cet  état  augmentera  main- 
tenant tous  les  ans  et  à  mesure  que  la  science  aura  trouvé  des  moyens  de  transport  de 
plus  en  plus  économiques. 

Dans  un  avenir  assez  prochain,  lorsque  nos  villes  de  l'intérieur  seront  par  la  cons- 
truction de  voies  ferrées,  mises  en  communication  facile  et  rapide  avec  nos  principaux 
•endroits  de  pêche,  le  commerce  du  saumon  frais  prendra  certainement  des  proportions 
inconnues  jusquici. 

De  toutes  les  Provinces  de  la  CNnifédération,  la  Colombie- Anglaise  est  la  plus  cé- 
lèbre pour  ses  pêcheries  au  saumon,  et  dans  l'espace  de  queUiues  années,  le  développe- 
ment de  cette  industrie  y  a  pris  des  proportions  presque  colosales. 

La  prise  qui  en  1879  n'était  que  de  trois  millions  de  livres,  s'est  élevée  jusqu'à 
douze  millions  en  1882,  montrant  une  augmentation  de  neuf  millions  en  trois  ans. 

"  Et  pourtant,"  nous  dit  M.  A.  C.  Andersen,  inspecteur  des  pêcheries  de  la 
Colombie,  "  vft  le  mancjue  de  bras,  occasionné  par  la  demande  toujours  constante  et 
l'engagement  des  ouvriers  sur  les  chemins  de  fer  et  ailleurs,  les  propriétaires  des 
fabriques  pour  la  mise  du  saumon  en  conserves,  dans  cette  Province,  malgré  l'abon- 
dance du  poisson,  n'ont  pu  livrer  au  commerce  les  quantités  qu'ils  auraient  pu  livrer 
dans  d'autres  circonstances." 

Les  chiftras  du  rapport  «le  la  marine  et  des  pêcheries  nous  disent  qu'il  a  été  pris» 
dans  les  rivières  du  Canada  ou  à  leur  embouchure,  en  1882,  quinze  millions,  deux  cent 
vingt  mille,  cent  quarante-six  livres  de  saumon-  Supposant  à  cha«]ue  pièce  une  pesan- 
teur moyenne  do  quinze  livres,  ce  (|ui  n'est  pas  exagéré,  nous  avons  im  million, 
trente-quatre  mille,  six  cent  soizante  et  seize  saumons.  Et  les  statistiques  de  1883 
constateront  certainement  encore  une  augmentation  sur  les  chiffres  ci-dessus. 

J'avais  donc  raison  de  dire  que  la  pô('he  au  saumon  était  encore  loin  d'être  épuisée 
au  Canada.  Aucun  pays  au  monde  peut  se  vanter  de  posséder  des  pêcheries  de  cette 
valeur- 

Espérons  que  les  pôcheiu's  de  la  Colombie  seront  assez  sages  pour  économiser  par 
une  pêche  judicieuse,  les  richesses  qu'ils  possèdent  dans  leurs  pêcheries  au  saumon,  et 
qu'ils  ne  seront  pas,  comme  dans  les  autres  Provinces,  obligés  plus  tard  de  faire  des 
efforts  coûteux  i)our  arrêter  leur  déclin  ou  empêcher  leur  épuisement.   Cette  réllection 


27 

m'est  suggérée  par  le  fait  que  l'on  parle  déjà  de  jeter  les  fondements  d'un  établisi^ement 
de  pisciculture  sur  les  bords  de  la  rivière  Fraser,  une  des  meilleures  de  cette  Trovince. 

Nous  remarquons  dans  le  rapport  du  commerce  de  1882,  qu'un  capital  d'au  delà  de 
deux  millions  de  piastres  et  sept  mille  hommes  étaient  emi)loyés  à  l'exploitation  de  la 
pêche  au  saumon  dans  la  rivière  Colombie  seule. 

"  A  part  la  quantité  de  saumon  frais  mis  en  conser\es  pour  l'exploitation  l'année 
dernière,  dans  la  Colombie-Anglaise,  au  delà  de  cinq  mille  barils  du  même  iK»issoii 
salé  ont  été  encaqués." 

"  La  demande  pour  le  saumon  en  saumure  semble  augmenter  rapidement  et  il 
n'y  a  aucun  doute  que  si  les  pêcheurs  veulent  donner  à  sa  préparation  tout  le  soin  et 
toute  l'attention  qu'elle  requiert,  le  saumon  salé  de  la  Colombie  aura  bientôt  une 
réputation  universelle.  Cette  branche  d'industrie  exigeant  moins  de  capital  (lue  la 
mise  en  boîtes,  offre  un  large  champ  aux  efforts  industrieux  des  pêcheurs  dont  les- 
moyens  sont  restreints." 

"  La  grande  valeur  commerciale  des  pêcheries  de  la  Colombie  est  maintenant 
mieux  connue  et  tout  porte  à  croire  à  leur  rapide  développement." 

"  L'énergie  qui  préside  à  la  construction  du  Chemin  do  fer  Pacifique  Canadien, 
fait  présumer  qu'avant  longtemps,  nous  serons  eu  communication  directe  avec  le» 
provinces  de  l'Est,  et  il  est  facile,  dès  à  présent,  de  concevoir  (luol  essor  va  donner  à 
toutes  les  industries  de  la  côte  du  Pacifi(iue  le  parachèvement  de  cette  importante  voie 
ferrée."    {A.  C  Andersoii.    Rapjxjrt  >.k  liiS2). 


XII 
PÊCHES  A  LA  TRUITE,  AU   POISSON  BLANC  ET  AUTRES. 

La  truite  aborde  dans  nos  rivières  et  dans  nos  grands  lacs.  Nous  en  avons  une 
grande  variété.     Les  meilleures  sont  la  truite  de  mer  et  la  truite  saumonée. 

C'est  sur  les  grands  lacs  de  la  Province  d'Ontario  ({ue  la  pêche  à  la  truite,  au  poissoa 
blanc,  etc.,  se  fait  sur  la  plus  grande  échelle. 

Ces  lacs,  que  l'on  a  avec  raison  appelés  mirs  intérieurs,  sont  peut-être  les  plus 
grands  du  monde  entier. 

Le  lac  Supérieur  seul,  couvre  une  superficie  de  trente  et  un  milles  carrés  et  l'éten- 
due des  lacs  Erie,  Huron  et  Ontario  est  égale  à  (;in(iuante  deux  milles  carrés. 

Plusieurs  rivières  importantes,  sillonnant  l'intérieur,  viennent  s'y  jeter,  et  ces 
rivières,  aussi  bien  (^ue  les  lacs  eux-mêmes,  sont  remplies  de  différentes  espèces  de 
poissons  recherchés  jîour  leur  saveur  et  délicatesse. 

Le  pêcheur  d'Ontario  peut  choisir  entre  la  truite  saumonée  pesant  jusiju'à  quatre- 
vingts  livres,  le  poisson  blanc  estimé  à  l'égal  du  saumon,  l'esturgeon,  lebrocliet,  le  doré, 
la  perche,  le  maskinongé,  etc.,  etc. 

La  pêche  sur  nos  grands  lacs  se  fait  au  moyen  de  filets  fixes,  en  mUm,  très  fins  et 
très  solides,  nasses,  trapi)es,  etc.,  et  ave<;  des  bateaux  à  voiles,  ouverts,  de  vingt  à  trente 
pieds  de  quille,  ou  sur  des  petits  batcaux-à-vaiH3ur  appelés  reuior(iueurs^/.s/nj!y  tug.% 

Deux  beaux  modèles  de  ces  {Xitits  bateaux-à-vapeur,  dont  l'usage  s'introduit  rapi- 
dement parmi  les  pêcheurs  de  la  Province  d'Ontario,  figuraient,  dans  la  galerie  cana- 
dienne, à  l'exposition  des  i>êclieries  de  Londres  en  1883  et  y  ont  attiré  l'attention  spé- 
ciale des  visiteurs. 

De  cincpiante  pieds  de  long  sur  douze  de  large,  généralement,  ces  remorfiwiir.9-pê- 
chcuTH  sont  la  propriété  do  marchands  do  poissons  (]ni  mettent  à  bord  des  hommes  à 
salaires  fixes,  ne  partageant  aucunement  dans  les  profits  de  la  pêche. 

Dans  certains  cas  do  prise  plus  <iu'ordinaire,  les  proi)riétairos  donnent  une  primo 
aux  pêcheurs  à  titre  d'encouragement. 


28 


I>es  avantages  queiiossèdcnt  ces  bateaux-à-vapeur  sur  ]e.s  voiliers  sont  faciles  à 
concevoir. 

D'abord,  si  le  temps  est  trop  calme  où  la  mer  trop  houleuse,  le  bateau  à  voiles  reste 
amarré  au  rivage,  mais  le  steamer  gagne  facilement  les  fonds  de  pêcbe,  et  tandis  que  la 
moitié  de  son  équipage  est  occupée  à  lover  l(!s  filets  mis  à  l'eau  le  jour  i)récédent,  l'autre 
moitié  jette  de  nouveaux  filets  et  sauve  ainsi  un  temps  précieux. 

Chaque  steamer  possùde  une  macliine,  esj)èce  de  moulinet,  servant  à  lever  les  filets 
€t  à  les  faire  sèclier  en  même  temps. 

Des  réfrigérants — refrigrrators — de  petites  dimensions,  montés  sur  quatre  roues  en 
fer  et  allignés  sur  le  }>ont  du  bateau,  reçoivent  le  poisson  au  fur  et  à  mesure  qu'il  est 
retiré  de  l'eau  et  aussitôt  les  filets  levés,  l'on  se  rend  à  toute  vapeur  à  la  gare  de  chemin 
<le  fer  la  plus  voisine,  les  boîtes  réfrigérantes  sont  roulées  du  bateau  sur  le  convoi,  prêt 
à  partir,  et  le  i)oisson  expédié  frais,  sans  transbordement  et  sans  manipulations,  aux 
Etats-Unis  et  sur  nos  marchés  de  l'intériein". 

A  part  (juatre  millions  cinq  cent  mille  livres  de  truite,  poisson  blanc,  etc.,  que  les 
pêcheurs  d'Ontario  ont  ainsi  expédié  frais  aux  mandiés,  en  1S82,  ils  ont  mis  en  saumure 
et  encaqué,  cinq  mille  soixante-et-dix-neuf  barils  de  ])oisson  blanc,  neuf  mille  sept  cent 
cinquante-huit  barils  de  truite  et  quarante-et-un  mille  trois  cent  soixante  barils  de 
brochets,  esturgeon,  maskiiiongé,  i)erche  et  autres  poissons  ;  total,  cinquante  six  mille 
<?ent  quatre-vingt-dix-sept  barils  de  toutes  variétés. 

Si  nous  multiplions  ce  dernier  chiffre  5G.197, — par  200,  nombre  de  livres  qu'il  y  a 
•dans  chafjue  baril,  nous  avons  onze  millions,  doux  cent  trente-neuf  mille,  sept  cent 
livres,  qni  ajoutées  aux  (piatre  millions  cinq  cent  mille  livres  de  poisson  frais  plus  haut 
mentionnées,  nous  donne  ini  gran(.l  total  de  quinze  unlUonn,  i-qit  cent  trente-neuf  mille 
sept  cent  litres  pour  l'année  1882. 

Je  ferai  remanjuer  ici  quo  la  iiopulation  de  la  Province  d'Ontario  est  composée 
surtout  de  cultivat(!urs  et  de  fermiers,  et  que  comparativemeiit  à  leur  étendue  et  à  leur 
importance,  des  i)êcheries  des  hics  occupent  peu  de  bras. 

Nous  pouvons  avec  raison  affirmer  (ju'elle  sont  susceptibles  d'un  bien  plus  grand 
développement,  que  leurs  produits  annuels  seraient  doubles  et  même  triples  si  l'on  y 
consacrait  plus  de  temps  et  si  l'on  y  engageait  un  capital  plus  élevé. 

Outre  les  produits  de  la  pêche  des  lacs  dans  Ontario,  nous  avons,  dans  les  Pro- 
vinces maritimes,  la  pêche  à  l'éperlan,  qui  durant  les  mois  d'hiver  emploie  plusieurs 

centaines  de  personnes  et  dont  la  valeur  annuelle  est  de $200,000.00 

La  pêche  à  l'alose,   valeur  annuelle 185,000.00 

"       l'anguille  "  80,000.00 

"      la  sardine.         "  ]  75,000.00 

"  "       auMinnonish     "  50,000.00 

et  plusieurs  autres  encore  dont  l'énumération  serait  trop  longue. 

En  résumé,  quoique  leurs  produits  se  vendent  à  un  j)rix  relativement  bas,  les 
j^êcheries  intérieures  du  Canada,  sans  parler  de  la  consommation  locale,  ont  donné  au 
commerce,  en  188!3,  une  somme  de  quatre  millions  de  jdastres. 

11  est  un  point  sur  le(iuel  je  désire  attirer  tout  particulièrement  l'attention  chi 
lecieur.  C'est  l'extrême  facilité  de  ])rendre  du  poisson  qui  existe  dans  toutes  les 
P'ovinces  de  la  Confédération.  Ce  fait  doit  être  un  jmissant  motif  d'encouragement 
pour  les  membres  de  la  classe  j-auvre  d'Europe  «pu  désirent  émigrer  au  Canada. 

Ils  peuvent  être  sûrs  d'avance  (jue  dans  n'importe  quelle  partie  de  la  Puissance 
ils  fixeront  leurs  demeures,  ils  trouveront  dans  les  pêcheries  un  moyen  certain  de 
subsistance  et  une  nourriture  saine  et  abondante  qui  ne  leur  coûtera  souvent  que  la 
l>eine  de  la  receuillir. 

\  la  Nouvelle-Ecosse,  au  Nouveau-Brunswick,  à  l'Ile  cUi  Prince-Edouard,  au  Cap- 
Breton,  dans  ]>resque  toute  la  Province  d'Ontario,  dans  toute  la  partie  Est  de  la  Pro- 
vince de  Québec,  à  la  Colombie-Anglaise,  au  Nord-Ouest,  l'émignant  trouvera  à  un  prix 


29 


nominal  des  terres  bonnes  et  fertiles  ;  et  dans  tous  ces  endroits,  il  pourra,  ou  mener 
de  front  la  culture  et  la  pêche  ou  seulement  faire  la  pêche  comme  aide  à  sa  culture  ; 
et  avec  de  l'énergie,  de  la  sobriété  et  de  l'économie  il  arrivera  eu  i^eu  de  temps  u 
l'aisance,  même  à  la  prospérité. 


XIII 

SYSTÈME  TÉLÉGRAPHIQUE  ET  BULLETINS  DE  PÊCHE. 

11  est  des  hommes  qui  semblent  se  dévouer  entièrement  au  progrès  et  à  l'avance- 
ment de  leur  pays  ;  qui  consacrent  à  cotte  (ruvre  toute  leur  intelligence  et  toute  leur 
énergie,  s'imposant  nue  somme  énorme  do  travail  et  ne  se  laissant  décourager  ni  par 
les  difficultés,  ni  i>ar  les  obstacles. 

L'Honorable  P.  Fortin,  député  de  Gaspé  aux  Communes  du  Canada,  bien  connu 
dans  notre  monde  ])olitique,  est  du  nombre  de  ces  patriotes,  qui.  Dieu  merci,  ne  sont 
pas  rares  parmi  nous. 

Homme  instruit  et  pratique,  ayant  consacré  plusieurs  années  de  sa  vie  à  l'étude 
des  questions  touchant  aux  intérêts  des  ])ôches  maritimes,  connaissant  leur  impor- 
tance comme  richesse  nationale,  le  Dr.  Fortin  ne  laisse  échapper  aucune  occasion  de 
travailler  à  leur  déveloi)i>emeut. 

IS'ous  devons  à  ses  efforts  énergiques  et  à  sa  persévérance  les  communications 
télégraphiques  établies  à  grands  frais  par  le  gouvernement  canadien  pour  venir  en 
aide  à  la  navigation  et  aux  pêcheries. 

Cette  ligne  télégraphique  qui  comprend  27,000  milles  carrés  de  nos  meilleurs  fonds 
<le  pêche,  reliant  entre  elles  nos  stations  do  pêche  les  plus  importantes,  communiquant 
à  tout  un  système  de  sémaphores,  phares,  etc.,  a  été  jugé  le  plus  parfait  actuellement 
existant  dans  le  monde  entier,  ])ar  les  jurés  de  l'Exposition  Internationale  de  Londres 
en  1883,  et  a  eu  les  honneurs  d'une  médaille  d'or  et  d'une  mention  spéciale. 

Contribuant  dans  une  large  mesure  à  rendre  i)lus  sûre  la  navigation  du  Golfe  et 
du  Fleuve  St.  Laurent  et  à  faire  éviter  aux  marins  l(\s  nombreux  dangers  qu'ils  y  ren- 
contrent, ce  système  télégraphique  a  eu  pour  résultat  immédiat  de  faire  réduire 
considérablement  le  taux  des  ])rimes  d'assurance  et  d'encourager  le  commerce  géné- 
ralement. Aux  pêcheurs  et  aux  pêcheries,  il  est  aussi  très  utile  et  d'une  grande 
importance. 

Tous  les  jours,  dans  chaque  bureau,  sont  affichés  et  distrilniés  des  bulletins  indi- 
quant la  température  probable  pour  les  vingt-quatre  heures  à  venir,  la  présence  de  la 
lioiTTE — bait — dans  certaines  localités,  le  mouvement  des  bancs  du  poisson,  la  quantité 
des  différentes  espèces  capturées,  etc.,  etc. 

M.  W.  F.  Witcher,  ex-commissaire  des  pêcheries  de  la  Puissance,  consulté  sur 
l'à-propos  d'éta))lir  une  ligne  télégraphi(iue  le  long  de  nos  côtes  maritimes,  écrivait 
on  1870  : 

"  L'xeploitation  d'une  industrie  aussi  importante  que  celle  de  la  pêche,  s^  faisant 
riur  une  étendue  cle  neuf  cents  milles  de  côtes,  est  nécessairement  accompagnée  de 
nombreux  dangers  et  de  fréijuents  mécomptes." 

"  Il  faut  souvent  exposer  sa  vie  et  sa  propriété.  Le  succès  dépend  beaucoup  de  la 
température,  cîes  saisons  et  de  div(>.rses  autres  causes.  Plusieurs  espèces  de  poissons, 
<rhabitudes  errantes,  sont  excentriques  dans  leurs  mouvements,  abondent  aujourd'hui 
dans  une  localité  d'où  ils  seront  complètement  disparus  le  lendemain.  A  vingt  milles 
d'un  établissement  de  pêche  important,  sur  une  côte  aride  et  inhabitée,  le  poisson 
peut  donner  et  séjourner  plusieurs  jours  sans  qu'il  soit  possible  aux  pêcheurs  voisins 
de  s'en  assurer.  A  d'autres  endroits  le  poisson  est  trop  abondant,  les  pêcheurs,  en 
trop  petit  nombre,  ne  peuvent  suffirent  à  sa  capture  et  à  sa  préparation  ;  tandis  que 
dans  un  poste  voisin,  les  hommes  ignorant  ce  fait,  sont  les  bras  croisés  et  peuvent  à 
jieine  prendre  assez  de  ix^isson  pour  leur  provision  d'hivor." 


30 


"  Des  bateanx-i)ênheur.s  reviennent  souvent  vides  au  port,  de  certains  fonds  de 
pêche,  où  un  peu  auparavant  ils  auraient  trouvé  le  poisson  en  abondance.  D'autres 
fjerdent  la  meilleure  ])artie  de  la  saison  de  p<"'che  à  croiser  le  golfe  à  la  recherche  des 
bancs  de  poissons.  ( -ependant  nos  mers  sont  remplies  de  poissons  qui  approchent 
certains  points  ijjçuorés  des  côte">  et  fréquentent  les  haut-fonds." 


elles  nos  meilleures  pliK^es  de  pêche." 

"  L'idée  d'établir  le  long  des  côtes  des  stations  d'où  l'on  i>eut  observer  les  mouve- 
ments du  pois-<on  et  en  donner  avis  aux  i)écheurs  a  déjà  eu  un  commencement  d'exé- 
cution on  Norvèîze,  on  Hollande,  en  Allemagne,  eu  Sicile  et  sur  la  côte  de  Cornwall  ;  et 
dans  tous  ces  endroits  ces  observations  ont  rendu  de  grands  services  aux  i^ècheurs  et 
ont  aidé  beaiicoui)  au  développement  des  pêcheries." 

"Je  ne  doute  nullement  que  l'établissement  d'une  ligne  télégraphique  serait  trî'S 
avantageuse  aux  |ȏcheurK  canadiens.  L'existence  d'une  telle  ligne  encouragerait  les 
capitalistes,  inspirerait  pins  de  conliance  à  ceux  (pii  journellement  s'exposent  aux 
fatigues  et  aux  dangers  de  la  pêche  et  nous  permettrait  indubitablement  d'augmenter 
la  production  de  nos  pêcheries  et  le  chili're  de  nos  exportations  de  poisson." 


XIV 


CONCLUSION. 

Je  ne  puis  mieux  terminer  cette  étude,  qu'en  citant  quelques  lignes  de  M.  P.  L. 
Simmons  dans  son  intéressant  ouvrage:  "  l'Iic  comnurcUil prodwts  of  the  .«m." 

"  Les  produits  que  la  mer  fournit  au  commerce  sont  plus  nombreux  et  plus  im- 
portants que  le  croient  généralement  ceux  qui  n'ont  i)as  fait  une  étude  spéciale  de 
cette  question. 

"  La  capture  de  la  morue,  du  hareng,  du  maquereau,  du  saumon,  delà  sardine,  du 
loup-marin,  et  autre  poisson  est  d'une  immense  valeur  pour  une  grande  partie  du 
monde  civilisé  et  emploie  plusieurs  centaines  de  milles  personnes.  L'huile  que  l'on 
obtient  de  la  graisse  de  la  baleine,  du  loup-nuirin,  du  marsuin,  du  requin,  etc.,  et  du 
foie  de  la  morue,  sert  à  l'éclairage  ,  à  la  médecine  et  à  l'industrie.  Les  arts  et  les  ma- 
nufactures tiennent  dans  plusieurs  des  parties  du  poisson  leur  matière  première.  Les 
I)eaux  de  loui>-nuirin,  de  marsuin  et  de  requin,  font  de  bon  et  excellent  cuir.  Nous 
obtenons  une  très  bonne  colle  de  la  vessie  natatoire  de  plusieurs  des  poissons.  Les 
rognes  de  morues  et  autres,  sont  non  seulemnt  un  met  délicat  et  rechercher,  mais 
«jfirent  aussi  un  excellent  appât  pour  certaines  pèches.  Un  guano  très  apprécié  est 
fait  avec  les  entrailles  et  les  débris  de  poisson  de  toutes  espèces." 

"  La  mer  est  plus  abondanmient  poiu'vue  d'êtres  animés  que  la  terre.  Dans  toutes 
les  parties  du  monde  entier,  une  côte  aride  et  inhabitée,  contient  souvent  et  nourrit, 
dans  un  espace  donné,  plus  de  poissons  et  d'animaux  aiiuatiques  (pi'aucun  autre 
endroit.  " 

"  h^  mp-  ..  '\'  up'Jc  a'aniraaux  de  toutes  sortes  et  chaque  couche  d'eau  semble, 
pour  ain^'  -p  fi  .r^js/Kl'^  i  une  e3i)èce  q\x\  lui  est  particulière,  depuis  les  plus  grands  jus- 
«[u'auxi.-.  .iB"  -ni  ;;  tits,  depuis  l'inunense  baleine,  la  uiorue,  le  requin,  jusqu'aux 
iuollusq\>.>  ..'u.uices  et  insectes  microscopiques.  La  mer,  les  lacs,  les  rivières  ont 
chacune  lei.-s  esp'.  ce*  .Merentes.  " 

"  L'Océan  a  aussi  les  plantes  marines,  les  unes  naissant  et  vivant  au  foml  de  la 
mer,  les  autres  flottant  îl  la  surface,  jetées  au  rivage  par  les  vagues,  et  toutes  jouant 
un  rôle  particulier  dans  l'économie  générale.  " 

"  Jusqu'ici  les  diverses  populations  du  globe  ont  donné  plus  d'attention  il  l'agricul- 


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turc,  aux  iusdustries  minières,  lorestièros  et  autres  qu'à  l'exploitation  de  leurs  richesses 
maritimes.  Quelques  nations,  la  Chine  par  exemple,  s'occupent  depuis  longtemps  de 
retirer  le  plus  de  profits  possibles  des  profits  de  la  mer  ;  plusieurs  contrées  de  l'Europe 
exploitent  aassi  certaines  pêches  sur  une  grande  échelle,  mais  ce  n'est  que  depuis  peu 
de  temps  que  l'on  a  adopté  im  système  régulier  d'exploitation  et  que  l'on  a  appelé  la 
science  en  aide  à  la  pratique.  " 

"  La  pisciculture,  Vaquicvlture,  Voslreicvllurc,  le  transport  des  petits  poissons  d'une 
localité  à  une  autre,  ne  comptent  encore,  pour  ainsi  dire,  que  quelques  années  d'ex- 
istence. " 

"  Toutes  les  nations  à  la  tête  du  progrès  de  la  civilisation  et  du  commerce,  et  en 
particulier  les  Anglais,  les  Français,  les  Hollandais  et  les  Américains,  tiennent  les 
produits  de  la  mer  pour  aussi  importants  que  ceux  de  la  terre." 

"  Cette  question  de  pêche  et  de  pêcheries  est  donc  pleine  d'actualité,  et  tout  travail, 
toute  étude,  tout  renseignement  de  nature  à  faire  connaître  davantage  leur  valeur  et 
leur  étendue,  devrait  être  favorablement  accueilli  du  public  ;  car  leur  importance  n'est 
pas  seulement  en  raison  des  richesses  immenses  qui  peuvent  être  tirées  du  fond  de  la 
mer,  sans,  apparemment,  en  épuiser  la  source,  mais  parce  qu'elles  sont  une  école  à 
nulle  autre  pareille  pour  un  grand  nombre  d'hommes  solides,  aguerris  contre  les 
dangers,  habiles  au  commerce  en  temps  de  paix  et  parmi  lesquels  la  patrie  trouvera 
de  vaillants  défenseurs  en  temps  de  danger  national." 

Je  désire  sincèrement  et  j'ai  l'espoir  que  nos  hommes  publics,  de  même  que  nos 
capitalistes,  donneront  à  cette  importante  question  toute  l'attention  (qu'elle  mérite  et 
iju'ils  uniront  leurs  ettbrts  pour  donner  à  cette  industrie,  source  de  richesse  et  de  gran- 
deur nationales,  tout  le  développement  dont  elle  est  susceptible. 


L.  Z.  JONCAS.